rśgles qui les gouvernent*» (44). Cette formulation a servi ci justifier 1’idśe que le « service public de la justice ne saurait śchapper aux memes exigences » (45). On voit cependant difficilement comment le juge commu* nautaire pourrait imposer, au nom de 1’efficacitś du droit communautaire directement applicable, un rś-gime commun minimum de responsabilitś de la puis-sance publique devant les tribunaux nationaux qui dśpassat le degrś de protection accordś aux particu-liers par le rśgime de responsabilitś du droit communautaire lui-mśme ; or, comme on l'a vu prścśdem-ment, les principes posśs par la Cour dans le cadre de 1’article 215 CEE limitent l’ouverture d’un droit k indem-nisation, s’agissant des mesures de politique ścono-mique, k la « violation suffisamment caractśrisśe d’une rśgle supśrieure de droit visant k protśger les parti-culiers >», c’est-ś-dire en pratique, n’ouvrent un droit k rśparation qu’en cas de meconnaissance manifeste et grave des pouvoirs des institutions, confinant a l’arbi-traire (46). II est douteux que Tapplication d’un tel standard pour sauvegarder les droits des particuliers devant les juridictions nationales puisse constituer un progres sensible dans le sens d’une protection renfor-cśe. On ne peut alors que se fśliciter — et ce n’est pas le moindre paradoxe de 1'arret Alivar — que le Conseil d'£tat franęais ait ouvert la voie a une reconnaissance du droit k rśparation, y compris en 1’absence de faute de la puissance publique, grace k un raisonnement qui permettrait d’indemniser un prejudice grave et special imputable k une disposition Iśgale. De meme, au-delś des particularitśs du raisonnement liśes k 1’organisa-tion specifique des voies de recours contrę la Cou-ronne en droit britannique, il est remarguable que les
(44) CJCE 27 fóvrier 1970 Commission c/ltalie, 31/69, Rec. 1970, 25 sp. 34.
(45) R. Kovar, Rapport au colloque do 1'lnstitut d'Etudes Europścn-nes de Bruxelles, prścitś, sp. 253.
(46) On peut rappeler śgalement que la Cour n'a iamais appliquś le principe de la responsabilitś sans faute, meme si elle ne 1'ócarte pas formellement : CJCE 13 juln 1972 Grands Moulins de Paris, 9 et 11/71, Rec. 1972, 425 ; 31 mars 1977 Compagnle industrielle et agricote du comtś de Lohóac, 54 ś 60/76. Rec. 1977. 645. CDE 1977, 435 notę A. Barav ; 24 juin 1986 Dóveioppement SA et Sociótó Clemessy c/ Commission (responsabilitó du fait de la gestion du FED). 267/82, non encore publiś.
juridictions britanniques se soient efforcśes de tirer les consśquences, sur le terrain de la responsabilitś de la puissance publique, de la violation constatśe des normes communautaires d’effet direct, mśme si elles exigent la preuve du dśtournement de pouvoir pour y parvenir. Enfin, les prises de position de certaines juridictions reconnaissant un droit k rśparation k partir de la misę en śvidence d’une violation du droit communautaire apparaissent comme des indices significatifs du souci du juge national d’assurer la sauvegarde des droits individuels.
Que ces Solutions ne soient ni parfaitement univo-ques, ni totalement satisfaisantes, c’est l’śvidence meme. Certains tatonnements śtaient inśvitables, dśs lors que les juridictions nationales se sont trouvśes brutalement confrontśes avec la revendication d’un droit k rśparation du fait du non-respect par les admi-nistrations nationales du droit communautaire. Sans doute serait-il souhaitable que la Cour de Justice encadre plus prścisśment la fonction impartie au juge national dans sa mission de juge communautaire de droit commun. Sans doute serait-il śgalement impor-tant que les juridictions nationales usent des possibi-litśs offertes par la procśdure du renvoi prśjudiciel pour inviter la Cour de Luxembourg k fixer de faęon moins śquivoque les exigences du droit communautaire quant k la protection des particuliers sur le terrain de la responsabilitś de la puissance publique (47).
(47) Sans doute śtait-ce une question prśjudicielle de cette naturę que le iuae Pescatore appelle de ses voeux quand il prócise qu’« il est K:oncevable qu'un jour la Cour soit saisie de demandes plus explicites visant d falre reconnaitre non seulement le manquement d'un Etat membre. mais encore certaines consśquonces do ce manquement -(article citś, II foro padano. 1972, sp. 18). Voir śgalement dans le mśme sens l‘ouvrage du mśme auteur, Le droit de Tintśgration. Gen6ve Sijthoff, 1972.
La (rśquence croissante des arrśts de constatation de manquement devrait favoriser une prise de position de la Cour quant aux effets du manquement constate sur la responsabilitś administrative des Etats membres: ś la datę ou nous relisons les śpreuves du prśsent article, vient d‘śtre rendu 1'arrśt constatant le manquement de la Rśpublique fśderale d'Allemagne du fait de la legislation relative a la puretś de la biśre (Reinheitsgebot), et le jour mśme du prononcś de 1’arret, les bras-series alsaciennes ont annoncś leur intention d’introduire des actions en responsabilitś devant les juridictions allemandes.
REVUE DU
MARCHĆ COMMUN, n° 305, Mars 1987
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