plus le grand homme (de Groot) en Grotius. Rien n’est plus deraisonnable, rien n’est plus insense que de voir un homme qui n’est cTaccord ni avec lui-meme ni avec les autres, entreprendre de son propre mouvement et sans que nous Ten ayons prie, de nous reconcilier avec les catholiques romains, et decider en oracie que nous pouvons et devons le faire96).
Ainsi plusieurs elements de Toeuvre de Grotius, decries par Feveque de Meaux, ont ete comme autant de jalons sur le chemin qui la rapproche du catholicisme. II y avanęa a un tel point qu’on est presque unanime aujourd’hui a reconnaitre qu’il a ete conduit irresistiblement a Romę. Apres Fapparition de son dernier livre, son grand adversaire Rivet le considerait definitivement comme un apostat. Barlaeus, ancien ministre protestant et ami de Grotius, deplore de Tavoir perdu, puisqu’il avait „repondu a monsieur Rivet avec les propres paroles de 1’Eglise Ro-maine”97). Et la posterite a confirme ce jugement. En 1925 un anglican atteste qu’apres avoir admis tous les decrets du Concile de Trente, Grotius ne fut plus protestant en aucun sens98). Un ministre remontrant ciot la serie en avouant que Grotius n’a pas compris les principes de la Refor-mation99).
9€) Lettre du 20 janvier 1643. Citee dapres Nederlandsche Stemmen.
D7) Lettre du 10 novembre 1645 a Joachim van Wickefort. Citee d’apres Ger. Brom, o.c., p. 278.
98) W. S. M. Knight, The life and works of Hugo Grotius, p. 283 („He himself — one who saw in the decrees of the council of Trent nothing but what was fully justified by the scriptures und the Fathers — was obviously no longer a Protestant in any real and definite sense”).
") A. Haentjens, o.c., p. 142. Quelques remarques sur ce livre tout recent per-mettront de voir combien il est difficile de nier 1’assentiment donnę par Grotius a la religion catholique. Les Remontrants, qui se rapprochent peut-etre le plus du catholicisme, se defendent pourtant scrupuleusemcnt de toute identification. lis s’acharnent le plus a contester que Grotius, qu’ils reconnaissent n’etre plus un des leurs, figurę parmi les adherents de Romę, et contrairement au temoignage de Barlaeus, ils lui font construire un catholicisme a lui, different de la doctrine de TEglise Romaine.
M. Haentjens constate des differences pour les dogmes de la satisfaction et de la transsubstantiation.
Grotius se serait ecarte de la doctrine catholique en enseignant que Dieu punit, non pas en premier lieu parce qu’Il a ete offense, mais parce qu’Il doit gouverner et maintenir Tordre; qu’Il aurait pu choisir un autre moyen s’Il l’avait voulu; que la satisfaction avait pour but de garder Thomme de peches futurs (o.c., p. 94-95).
Or Grotius, s’attaquant a Socin, a tache de combattre son adversaire avec ses propres armes. A son instar il a parle par consequent avant tout en juriste. II va sans dire que par notre elevation dans la vie trinitaire de Dieu il y a aussi quelque chose de change dans notre relation juridique envers Lui. Un catholique peut parler de la satisfaction en ces termes, pourvu qu’il ne pretende pas epuiser tout le mystere. Quand Grotius dit que Dieu aurait pu choisir un autre moyen, il parle evidemment en humanistę. M. Haentjens, se basant uniquement sur la Revelation, dans laquelle il n’y a pas d’autre possibilite que la satisfaction donnee en fait par le Christ, est moins fait pour le suivre dans cette voie que les catholiques. La distinction des theologiens entre la „potentia absoluta,J et la „potentia ordinaria’" de Dieu leur
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