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188 SAINTE-ANNE DAURAY

le transmettre a leur familie, s’ils viennent ó ćtre tućs.

A minuit on commenęa a cćlćbrer des messes et A distribuer la sainte communion.

A 4 h. 1/2, une alerte : dlait-cc l’arrivće de la troupe ? On se prćcipite vers la grille pour faire face k l'attaque... c'ćtaient des amis qui arrivaient.

A 6 h. 1/2, l’dvóque descend dans la basilique. Pendant sa messe 1’ćglise regorge de monde. Des chants ćclatent oC» Pon sent passer k la fois de 1'enthousiasme religieux et un souffle guerrier: Nous mulona Dicu, — Cat/iolu/ues et liretons toujours,Sainte Annę, 6 bonnc mdre, —Santćz Anna, o mam karet, .— Credo. Et jamais ces paroles, que Pon entend rćpćter si souvent, n’ont exprimć une telle intensitć d’emotion (1).

On est prćt & se battre ; mais y aura-t-il combat? — L’agent du fisc sera-t-il accompagne de la force armće, comme cela s‘est vu dans un grand nombre de localitćs morbihannaises?... S‘il se prćsente seul, il ćcoutera la protestation, et se retirera sans općrer. Mais s’il est accompagnć de soldats, le choc est inćvitable, parce que la troupe voudra Iui faire un chemin, et qu’on est dćcidć ici k ne pas laisser passer.

Dans les rues du viiiage, beaucoup de curieux, et sans doute aussi des esp ons ; aux fenótres des maisons, des spectateurs a 1'abri. Au sornmet de la tour, des guetteurs inspectent Phorizon ; des observateurs grim-pós sur les kiosques ont 1’ceil fixś sur la routc d’Auray et sur celle de la Chartreuse, paroCl doit arriver cclui qu’on attend ; des cyclistes annoncent que des renforts continuent de venir. Dans 1’enceinte de 1'esplanade, les dćfenseurs, au nombre de 6 ou 7000 : quelques hommes en paletot; un certain nombre d’ouvriers ; la

(1) « Les pritres qui font leur action de grAce dans le choeur ont

fieinc k retcnir leurs larmcs; quant k ccux qui disent la messe, 'ćmotion les gagne et les force k sinterrompre » (Senuine fle/f-ffieuse, p. 208).

l.KS KOUVKLLES FfeTBS    189

plupart, des paysans cn blouseou en veste bretonne(l). On en remarque qui portent des insignes, une croix

.    La JOURNfiK DES INYSNTA-RES EN 1900

blanche ou rouge, une mćdail e de Sainte-Anne... Pas

(1) Les ca(holiques d’Auray ne sont pas venus, parce qu’ils ont eux-mćmes A dćfendre leur Aglise ce jour 16. Ccux de Languidic ont ćtć retenus chez eux pour ia menie raison.

L'Argus de U Prttse, en centralisant tous les renseignemepls qui ont ćtć donnćs de cette journće, montre 1‘lmportance quc prtt la raanifestation aux yeux de 1’opinion publique. — Le chiffre des manifestanta varle d‘u» journal 6 1'autrc entre dlx et vingl mille. Etchose curieuse. l’Avaluation la plus modeste vient du Directeur du Pćlerinage lui-mime : « de six 6 sept mille! » — Ouant 6 Clemenceau. dans son discours 6 ses ćlectcurs du Var, il ćvoqua derant eux le spectre d’une nou velle chouannerie en reprłsentant des milliers dc Bretons ronges en bataille « dans les plaincs dWuray ».    ^

Or ces Bretons, que Ton vexait 6 plaisir pour leurs convictions religieuses, quitle A les faire passer ensuitc pour les ennemis dc leur pays, allaient montrer, quelques annćes plus tard, dans d'autres plaines que cellcs d'Auray, de ąuels hAroismes ils sont capables toutes les fois qu’il s’agi.1 pour eux de faire leur devoir.



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