En presence de tels cas, serait-ce trop de parler de 1’influence de la langue liturgiąue?
Chez Antonin, dans aucun des trois exemples, Dieu est sujet d'operań. II est possible que le verbe ait pour lui le sens generał de ‘agir sur, faire, accomplir’, sens que nous rencontrons d’ailleurs souvent dans la Vul-gate. Le substantif opus a, chez lui, le meme caractere generał. Dans son recit, a cótć de l’expression liturgique opus Dei, 184, 12: ascendent mo-nachi et faciunt opus Dei (rec. altem: celebrantes... officium), le mot opus a aussi le sens profane d^difice, dans 173, 12: Quae tunis ąuadrangulis et opus calvum, non habens tectum. Un autre auteur de cette epoque, Gregoire de Tours, se sert d'operari, tant pour les travaux des champs, par exem-ple, De virt. s. Mart. 2, 571: mulier quaedam... agrum adit... Cumque operare coepisset..., que construit avec oirtutes, miracula, parfois avec un saint comme sujet, mais bcaucoup plus souvent dit de Dieu et alors depen-dant du verbe dignari. Ce pourrait etre la encore un indice de 1’influence de la langue liturgique.
En examinant l’idee de ‘miracle’, nous avons vu que, dans la Bibie et en dehors d’elle, un miracle est souvent considere comme un signe, comme une chose par laquelle Dieu manifeste sa puissance. Cet aspect de ‘montrer, indiquer’ se retrouve parfois dans les verbes qui 1’accom-pagnent. Ainsi saint Jean, dans son fivangile, 2, 18, dit: Quod signum ostendis nobis quia haec facis ? et dans 9,3: ut manifestentur opera Dei in illo et encore dans 10, 32: Multa bona opera ostendi vobis ex Patre meo. Chez Antonin, nous voyons ostendere, frćquent dans la Vulgate, aux deux en-droits suivants, d’abord dans 176, 4 s.: in quibus aquis multae oirtutes os-tenduntur, ensuite dans 177, 7 s.: in ipsa pronincia multas oirtutes osten-dit beatus Georgius. Grćgoire de Tours 1’emploie, lui aussi, plusieurs fois, par exemple dans Hist. Franc, 2, 32: Ad cuius nunc sepulchrum multae oirtutes et creberńmae ostenduntur, dans le sens ou, ailleurs, il prćfćre apparere, par exemple, Hist. Franc. 5, 63: multae uirtutes ad sepulchrum beati Martini ap-paruerunt. Grćgoire le Grand, dans Ep. 4, 304, dit d’une relique de l’apó-tre Paul: ex quibus multa miracula in populo demonstrantur.
En ce qui concerne Antonin, on remarque quatre autres verbes qui se rapportent aux guerisons miraculeuses.
Dans 163, 2 - 165, 16 - 166, 3 - 174, 8 - 175, 16 et 190, 4, ou U est question de malades en gćneral, il appelle la guerison sanare. Au con-
1 MGH script. rer. Mer. 1, 628, 25.
* Ibid44, 17. a Ibid., 203, 5.
4 MGH epist. 1, 1, 266, 16.
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