directement ou indirectement, a la notion de ‘miracle’, cela est proba-blement dd, en partie, k une difference de caractćre. Egćrie donnę en generał 1’impression d’etre plus pondćree; les prodiges retiennent moins son attention que les choses d’un interet plus gćneral. A differents endroits elle montre un besoin de savoir insatiable. Bibie en main, elle prend un pieux plaisir & verifier sur place les donnees de l’£criture. Antonin, de son cóte, relate candidement l'existence de saintes reliąues des plus singulieres. Nous ne devons cependant pas oublier qu’un siecle et demi environ separe les deux auteurs. Au cours de ce laps de temps le besoin superstitieux du miraculeux et du sensationnel n’avait que croitre et embellir. En plus d’une difference de caractere probable, la difference d’ćpoque est surement, et sans doute meme en premier lieu, un facteur important.
En ce qui concerne le choix des mots, tant Egerie qu’Antonin puisent dans 1’idiome en usage chez les chrćtiens. Pour ‘miracle(s)’ ils emploient tous deux les christianismes mirabilia et virtus. Chez aucun des deux nous ne voyons le mot miraculum dans ce sens. On peut se demander, surtout en ce qui concerne Antonin qui parle si souvent de miracles, quelle est la raison de cette absence, d’autant plus que miraculum est un mot courant chez les auteurs chrćtiens. Pour commencer il ne faut pas oublier qu’Antonin n’emploie mirabilia qu’une seule fois dans ce sens. Ensuite, le contexte laisse supposer que sur les 16 fois ou il parle de ‘miracle’, il vise 11 fois une ‘guerison miraculeuse’. Dans ces cas, il emploie 10 fois virtus et 1 fois beneficium, termes qui lui paraissent sans doute plus appropries parce qu’ils font surtout ressortir la puissance et la bonte de Dieu, tout comme dans la litterature grecque on parle volontiers a ce sujet de Svvafuę. II est difficile d’admettre qu’il ait encore ćtć sensible k 1’arriere-pensee deplaisante qui, pour un chrćtien, s’at-tachait au mot miraculum, mot d’origine profane et employe surtout dans les recits de sorcellerie. Dans le sens de ‘miracles’ on voit en outre, chez Egerie, 1 fois le mot assez neutre gęsta, alors qu’Antonin parle deux fois de ńgnum et une fois de secretum; le premier de ces deux est un terme tres courant du vocabulaire de la litterature chrćtienne.
La ‘vertu miraculeuse’ s’exprime chez Antonin par benedictioy qui est un neologisme chretien, et par gratia et virtus, mots qui, dans le langage profane, avaient deja un sens plus ou moins apparente.
II n’y a pas de mots, ni chez Egerie ni chez Antonin, qui pourraient designer de vraies reliques, bien qu’figerie ait tres probablement du en voir au cours de son voyage et que, dans le cas d’Antonin, il n’y ait aucun doute puisqu’il en parle par deux fois. Tous deux parlent pour-tant de choses ćtroitement lićes a la notion de Telique\ Egćrie connait
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