De nombreux philologues ont signale la freąuence des verbes com-posćs et leur multiplication dans le langage parlć de l’epoque tardive. D’une part, les prćfbces peuvent remplir une fonction adverbiale pre-ponderante, d’autre part, ils peuvent servir k donner au verbe simple 1’aspect d’un aoriste, aspect par Ieąuel la fonction adverbiale s’att&iue. A la longue, et ceci encore est surtout vrai pour la langue parlee, le juste sentiment des nuances que le prćfixe confere aux mots s’estompe, de sorte que la difference entre le mot simple et son compose devient a peine perceptible. II est certain que le gobt du style expressif et sonore, qui se manifeste aussi par d’autres moyens, incita beaucoup d’auteurs k former, au moyen de nouveaux prefixes, des derives de composes, pour dire ce que le compose disait primitivement. Jusqu’au jour oh ces derives, a leur tour, perdirent de leur valeur signifiante1. Parmi les prefixes employes pour former aussi bien les composes que les derives de composes, les plus importants sont: eon-, ad-, per- et de-2. Chez figerie, les composes et les derives de composes en per- sont les plus nom-breux, alors que dans plusieurs cas nous trouvons egalement les mots simples correspondants. Dans son celćbre commentaire sur figerie, Lofstedt3 4 semble croire que les composes de ce genre n’ont, chez elle, aucune nuance propre. Nous sommes, au contraire, convaincu et nous esperons pouvoir en donner plus loin des preuves nombreuses, que, sur ce point aussi, figćrie a un sens innć de la langue et choisit en connais-sance de cause le mot simple ou le composć. Spitzer partage cette opinion, bien que pour d’autres raisons. Dans ce qui precMe nous avons dćja fait remarquer que ce dernier voit en figćrie une chretienne pro-fondement convaincue, qui met tout en oeuvre pour donner k ses com-pagnes de couvent un compte-rendu de son pślerinage, aussi evocateur et aussi vivant que possible, afin de leur permettre en quelque sorte de revivre personnellement son voyage d’etape en ćtape et de participer k son pieux ćmerveillement b la vue et k 1’identification des saintes reli-ques et des precieux souvenirs. De la vient l5impression de prolixite que donnent souvent ses descriptions enregistrees avec une prćcision vetilleuse. C’est k la lumi^re de cette mentalitó (id est’ que Spitzer ex-plique chez £gćrie Tabondance des composes en per-, ‘which give the action a perfective (voluntaristic) aspect... I ... ascribe to all these per-
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Cf. E. Lofstedt, Komm., p. 92, et VermisehU Studien zur lakinischen Sprachkunde und Sjmlax, Lund 1936, p. 124; Bonnet, o.c., p. 229; D. Barbelenet, De l'aspect iterbal en
latin ancien, Paris 1913, p. 16.
* Cf. Bonnet, o.c., p. 229; Grandgent, o.c., p. 14; E. Lofstedt, Komm., p. 92 et 124;
Hofmann - Szantyr, o.c., p. 284.
9 P. 92 et 124.