8 SAINTE-ANNE DAURAY
L*Annuaire de 1804 constate que les Pólerinages se renouvellent avec au moins autant de zfcle [qu’avant la Rdvolutionj; tous les ans il s'y trouve un nombre infini de personnes (1).
A la mćmc ćpoque les archives municipales de Plu-mergat signalent que « la route de Vannes k Sainte-Anne est cncombrće de pfclerins ».
En 1807, M. Allain, vicaire gćnćral dcrit que « 1’ćglise est tr£s frćquentće et qu’un grand nombre de pfclerins y v’iennent de toutes les parties de la Bretagne » (2).
Le P. Martin, rćsumant dans une apprćciation genć-rale la physionomie du Pólerinage, declare qu'aprós ces temps dorage, la Dśvotion se retrouva la mórae que dans scs plus beaux jours.
Mais si la pićtć avait survćcu k la tourmentc rćvo-lutionnaire, en revanche les fidćles n’avaient sous les yeux que le spectacle lc plus attristant. Au Bocenno et tout autour, il n’y avait plus, de mćme qu’au com-mencement du XVII* siacie, que des ruines: couvent dćvastćet devenu une habitation profane, statuę mira-culeuse et saintes reliques disparues, autels brisćs, chapelle saccagće; partout le spectacle de la desolation, au milieu d'ćdifices delabres qui semblaient voućs ó une disparition prochaine.
De ces ruines et de ces dćbris qui sont 1’image de la mort, que peut-il sortir dćsormais ?
II en sortira la vie, une vie religieuse plus intense que jamais.
La volontś du ciel n’a pas changć: il veut toujours que sainte Annę soit honorće ici.
L'ćv6que, dfcs son arrivće dans le diocfese, fut mis en possession de la chapelle : avec 1'autorisation d’y cćlóbrer la messe il reęut le droit de percevoir les
(1) Aonuaire duDćpartementduMorbihan pouiTanXU (Lorient: chex Le Coa/).
(2) Areh. dtp., V, Pilerinoge de Saintc-Anne.
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offrandes. — Cćtait du reste un acte politique de la part du prćfel: au moment ou les chouans s’oppo-saienta la cćlćbration du culte dans les ćglises, il leur faisait ćchec en encourageant les cćrćmonies reli-gieuses dans un centro tr£s frćquentć ; il dćsarmait les ennemis du rćgime en leur ótant tout pr£texte de cricr k la persdcution (1).
M,r de Pancemont, devenu locataire du couvent, se prćoccupa aussitót d'y installer des prćtres. Le P. Blouet, ancien carme, ćtait dans le payset per-sonne n'ćtait aussi qualifić que lui pour renouer les traditions du Pfclerinage (2). L’óvftque n’hćsita pas k le nommer « prćfet de la chapelle ». II lui donna commc auxiliaire M. Guennec, auquel vinrent plus tard s’ad-joindre le P. Thomas, ancien carme luimćmc et sacriste de la chapelle, et enfin M. Le Floch.
Ces chapelains <* n’avaient nulle intendance sur le tempcrel de la maison ; leur occupation unique ótait de rpcevoir lesmesses,de recueillir lesofTrandcs,d’entendre les confessions, et de prendre soin de 1’eglise » (3).
Avec les modiques ressources dont ils disposaient, ils travaill6rent k reconstituer peu & peu les ćlćments disparusdu Pfclerinage.
La Rcliyue avait ćtć providentiellement sauvee au milieu du vandulisme generał: le P. Thomas, k qui elle avait ćtć confiće, la garda jusqu’en juin 1803; il la
(!) Au moment oit le nouveau rćgime sorti de la Rćvolution travaillait (dans son propre intćrćt sans doutc, mais avec sincćritć nćanraoins) & la padfication des conscicnces, les chouans, — dont le soulóremenl, provoquć dabord par la persćcution religieusc, avait peu h peu ćvoluć en mouveraenl politique, qu’ils tenalent A poursuivre jusqu‘au rćtablissement dc la royautć, — comprenaient que la lutte pcrdrait sa principale raison d'ćtre aux ycux dn peuple, sł la persćcution cessait, c'est-A-dire si les prćtres recom-menęaient A cćlćbrer publiquement la messo dans les ćglises.
(2) Four donner au nouveau chapelain un prestige plus grand, et en mćme ternps pour montrer qu'il rattachait 1'ancien carme au clergć dc son diocćse, l’ćvćque nomma le P. Blouet chanoine honoraire (Archioes de FEv4chł),
(3) D’apxćs les Nlćmoires lnćdits du P. Cućnet.