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dćrable. D’ailleurs sainte Annę n’est pas seulement la patronnc des Vannetais, elle cst ćgalement la nótre et celle de la Bretagne entifcre » (1).
Dans ses allocutions il ne parlait que de sainte Annę : il racontait ses miracles, la grandeur de l’ceuvre entre-prise, les avantages innombrables d’un tel acte de foi; c’ćtaitaussi un acte de pićtć filiale. « Sainte Annę est votre m£re, disait-il; quel est donc celui, parmi les Brctons, qui refuserait de bAtir une maison ń sa m6re ?... » On lui rćpondait par des larmes ; les paroisses rivalisaient de gćnćrositć; partout sur son passage non seulement les dons affluaient, mais la dćvotion populaire ćtait ravivće (2).
Et ces courses, commencćes en 1867, il les continua presque sans interruption jusqu’6 la dćclaration de guerre en 1870. A 1'automne 1872, il les reprit de nou-veau, et il nes'arróta qu’en 1874.
II allait partout ou il espćrait reeueillir une of-frande(3), ne reculant devant aucune dćmarche, rćpon-dant aux critiques par le sourire et aux injures par le silence, ne se laissant mćme pas dćmonter par les pires calomnies (4).
Quelles joies il ressentait quand les pićces d’or du riche et Tobole du pauvre lui ćtaient offertes de bon
cceur: « Comme sainte Annę est aimćc, s'ćcriait-il sou-
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(1) Lellrede fArch. de Rennet: juillct 1868.
Naturellement le dioetse dc Yannes contribua A l’oeuvre pour la plus large part. L'dvćque, par unc circulaire du 25 juillct 1867, annonce quc le Papę l'avait autorisć A faire bAnćficier * l'oeuvre de Sainte-Anne » des honoraires de messes A dire pro populo, en dehors des dimanebes ct des quatrc fAtes d'o.bligation. Et de ce chef, sans parler des dons parliculiers dcmnndAs aux prAtrcs par M»r Gorailhon, les curAs ct les recteurs ont versA A eux sculs plus de la dix-huitiAmc partie de la dApcnse totale.
(2) Dans chaquc paroisse des nolables continuaient Toeurre du quAteur, en parcourant tous les quartiers.
(3) Aux halles de Lorient, ce ful de Tenthousiasme. Ouand le quAteur se prćsenta, un mot d’ordre circula dans tous les Atalagcs: la premićre ventc dc lajournAc fut consacrće A sainte Annę.
(4) Pendant la guerre, une rumeur infAmc osa dire quc M. Guil-louzo enYojrait aux Prussiens le produit de ses quAtes!...
vent en racontant ses succ£s de qu6tcur! Nous rćus-sirons! qu'on presse les travaux ». Et en effet k chaque jour de travaux suffisait chaque jour de qućte (1).
Dans quelle mesure rćussit-il ?
A cette question les dćpenses qu’il a pu solder sont la meilleure rćponse.
En 1867-68-69, il a payć, en moyennc plus de 11.000 fr. par mois h 1’entrepreneur (2).
Mais, & mesure que les travaux arancent, la perspec-tive des dópenses devient de plus en plus effrayante.
Le devis limitatif du concours, sur lequcl avaient tablć sans doute les signataires du contrat, ćtait de 350.000 fr.
• Quand Tarchitecte fit plus tard devant eux le devis estimatif, il comptait une depense obligatoire d'au moins 550.000 fr.
Mais cette somme ćtait cncore k peine la moitić de la dćpense totale du gros oeuvre.
Aussi lorsqu’il fut question des vodtes, il y eut un moment d’hćsitation anxieuse. D’apr£s le cahier des chargcs, les nervures pouvaient 6tre en crazanne (3); mais k 1’idće que le granit allait cederMa place k la pierre blanche, un cri unanime de protestation se fit entendre.
L’ćv£que, troublć par ces rćciamations et efTrayć
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(t) Notice rnanuscritc dc M. Le Digabel (Areh. du Pil.),
(2) Voir le relevi des mandat* dc paiements : 1" cahier, p. 289.
Dts le dćbut une Commistion diocóuinc avait iii noramće par
r<rique, avec charge de contrftler les travaux et les dćpenses.
(3) L'archttecte dóclare dans sa lettre du 19novembre 1868. que * la pierre dc crazanne, ćtant prćvue dans le marchć, pouvait Gtre employće aussi bien quelc granit. >
Dautre part nous savons, par la m£mc lettre, et par la dćclara-tion dc M. Normand, que la Commission diocósaine ne s'ćtait prćoccupee ni dc la vońt* ni du dallage, dans le contrat passć avec 1’entrepreneur le 4 novembre (Arch. du Pil., I, p. 225 et sqq).