En attendant Godot resume

En attendant Godot est une pièce de théâtre en deux actes, en français, écrite en 1948 par Samuel Beckett et publiée en1952 à Paris aux Éditions de Minuit. La particularité de ce livre vient du fait que le nombre de scènes n'est ni décompté ni annoncé. La première page du manuscrit français porte la date du « 9 octobre 1948 », et la dernière celle du « 29 janvier 1949 ».

Elle s'inscrit dans le courant du théâtre de l'absurde.

Création

Après l'écriture d'Eleuthéria, où Samuel Beckett s'était retrouvé dépassé par trop d'actions et de personnages, il choisit de s'attaquer à un sujet plus simple1 : « J'ai commencé d'écrire Godot pour me détendre, pour fuir l'horrible prose que j'écrivais à l'époque »2, « la sauvage anarchie des romans »3, déclara l'auteur1.

La création a eu lieu le 4 janvier 19534 au Théâtre de Babylone, avec une mise en scène de Roger Blin qui jouait lui-même le rôle de Pozzo. Il était accompagné de Pierre Latour, Lucien RaimbourgJean Martin et Serge Lecointe. Roger Blin a choisiPierre Louki pour le rôle de Lucky.

Résumé

Deux vagabonds, Vladimir et Estragon, se retrouvent sur scène, dans un non-lieu (« Route de campagne avec arbre ») à la tombée de la nuit pour attendre « Godot ». Cet homme — qui ne viendra jamais — leur a promis qu'il viendrait au rendez-vous ; sans qu'on sache précisément ce qu'il est censé leur apporter, il représente un espoir de changement. En l'attendant, les deux amis tentent de trouver des occupations, des « distractions » pour que le temps passe.

Des inquiétudes naissent : est-ce le bon jour ou le bon endroit ? Peut-être est-il déjà passé ? Que faire en attendant ? Au milieu du premier acte, un autre couple entre en scène : Pozzo et Lucky. Le premier est un homme très autoritaire, le propriétaire des lieux si l'on en croit son discours. Le second est un Knouk, une sorte d'esclave, un sous-homme tenu en laisse, que Pozzo commande tyranniquement. Le jeu continue quelque temps, Estragon reçoit des os de Pozzo. Pour Vladimir, le traitement subi par Lucky est une honte, un scandale ajoute Estragon, mais sans réelle conviction. Peu de temps après, les deux vagabonds infligeront les mêmes sévices à Lucky. À la demande de Pozzo, Lucky interprète une danse, la « danse du filet ». Muet le reste du temps, il se lance ensuite dans une tirade de plusieurs pages sans aucune ponctuation, morcelée et inintelligible. Les deux nouveaux venus disparaissent, et les deux vagabonds se retrouvent à nouveau seuls sur scène.

Godot n'est pas encore venu. Un jeune garçon apparaît, envoyé par l'absent pour dire qu'il viendra demain. Vladimir a l'impression d'avoir déjà vécu cette scène, mais le garçon ne se le rappelle pas. Fin de l'acte I.

Acte II, la lumière de la scène se rallume sur le même décor. Seul l'arbre a changé d'apparence : il a quelques feuilles. Au début de l'acte, en l'absence d'Estragon, Vladimir est « heureux et content », ce qui fait de la peine à Estragon à son arrivée sur scène : « Tu vois, tu pisses mieux quand je ne suis pas là ». Le premier acte se rejoue à l'identique, plus rapide et avec quelques variations. Estragon ne se souvient pas du jour précédent malgré les efforts de Vladimir pour le lui rappeler. Arrivés sur scène, Pozzo et Lucky tombent au sol. L'aide se fait attendre, Estragon souhaitant la monnayer, et Vladimir se lançant dans des tirades sur la nécessité d'agir. Pozzo affirme être devenu aveugle et Lucky est devenu muet, mais il ne se rappelle plus quand, « un jour pareil aux autres ». Après leur départ, étant le seul à se souvenir des événements de la veille, Vladimir réalise la futilité de son existence. La fin de la pièce ne réserve aucune surprise : le garçon de l'acte I vient délivrer le même message, sans se souvenir être venu la veille. Les deux compères envisagent de se suicider en se pendant à l'arbre. Estragon dénoue sa ceinture, son pantalon tombe. Ils y renoncent car ils cassent la ceinture en voulant s'assurer de sa solidité. Enfin, un dernier échange : « Allons-y » dit Estragon. « Ils ne bougent pas » précise Beckett en didascalie.

Analyse du titre

Godot est probablement l'œuvre la plus célèbre du dramaturge irlandais, et de nombreux livres et articles ont tenté de découvrir qui était Godot. L'une des tentatives d'explications récurrentes est que Godot serait le mélange du mot anglais « God- » (Dieu) et d'un suffixe français populaire « -ot ». Cette explication donnerait une dimension métaphysique à la pièce : les deux personnages attendent l'arrivée d'une figure transcendante pour les sauver, mais elle ne vient jamais.

Beckett a toujours refusé cette interprétation : « Si j'avais voulu faire entendre cela, je l'aurais appelé Dieu, pas Godot ». Il a lui-même montré qu'il y avait une pluralité d'interprétations possibles : « Du reste il existe une rue Godot, un coureur cycliste appelé Godot ; comme vous voyez les possibilités sont presque infinies ». Quand Roger Blin lui demanda qui ou ce que Godot représentait, Beckett répondit que ce nom lui était venu par association avec les termes d'argot « godillot, godasse », les pieds jouant un rôle prépondérant dans la pièce1. Il affirma également n'avoir lu Le Faiseur de Balzac5, où les personnages attendent la venue d'un « Monsieur Godeau » pour les sauver de la ruine, qu'après avoir écrit Godot1.

Beckett précise aussi en janvier 1952 dans une lettre à Michel Polac :

« Je ne sais pas plus sur cette pièce que celui qui arrive à la lire avec attention. [...] Je ne sais pas qui est Godot. Je ne sais même pas, surtout pas, s'il existe. [...] Quant à vouloir trouver à tout cela un sens plus large et plus élevé, à emporter après le spectacle, avec le programme et les esquimaux, je suis incapable d'en voir l'intérêt. Mais ce doit être possible. »

Premières représentations

La pièce fit scandale à l'époque. Les premières semaines de représentations, la moitié de la salle sortait avant la fin de l'acte I. D'autres spectateurs agacés restaient pour contrarier le jeu des acteurs en huant, et en faisant du bruit. Godot déclenchait chaque soir des batailles rangées entre les défenseurs de la pièce et les mécontents. La situation a dégénéré un soir en une bagarre et le rideau s'est baissé au début de l'acte II. C'est aussi ce qui l'a rendu célèbre : les gens se déplaçaient pour vivre le scandale, plus que pour découvrir un jeune auteur.

L'acteur qui jouait Estragon, Pierre Latour, ne voulait pas baisser son pantalon à la fin de la pièce, car il trouvait cela ridicule6. En apprenant cela, Beckett écrivit à Blin pour lui expliquer que la chute du pantalon était une des choses les plus importantes de la pièce. Après de longues négociations, Latour accepta. Le pantalon tomba. L'effet produit fut assez inattendu : ce fut un des rares moments de Godot où personne ne rit.

La pièce

En janvier 1953 retentit au théâtre Babylone le bruit d'une curieuse bombe, dont l'explosion allait bouleverser le monde du théâtre et de la littérature contemporaine. Dans cette salle parisienne alors en faillite que dirigeait Jean-Marie Serreau, Roger Blin mettait en scène En attendant Godot de Samuel Beckett (1906-1989), sa deuxième pièce après Eleutheria (écrite en 1947), mais la première représentée. Indiscutablement, le verbe attendre avait trouvé en « Godot » une sorte de complément d'objet éternel. Il ne serait plus possible d'évoquer l'idée de l'attente sans qu'aussitôt surgisse l'image de deux clochards en chapeau melon au bord d'une route.

    Publiée l'année précédente aux éditions de Minuit, la pièce de Beckett, avant d'être accueillie au théâtre Babylone (dans une distribution réunissant Lucien Raimbourg, Pierre Latour, Roger Blin et Jean Martin), avait essuyé le refus de nombreux directeurs de salle. En attendant Godot appelait la polémique non seulement entre ses détracteurs et ses partisans, mais aussi quant à sa signification.

    La pièce connut dans les années qui suivirent une fortune triomphale en Europe avant d'entrer, mise en scène à nouveau par Roger Blin vingt-cinq ans après sa création, au répertoire de la Comédie-Française.

    Un drame sans action   

    On ne saurait résumer la pièce de Beckett en recourant à la catégorie de l'action dramatique, tant celle-ci fait défaut. C'est sur ce déficit essentiel que s'élabore une dramaturgie immobile du ressassement, de la spéculation sans fin et de l'élan interrompu.

    Deux clochards, Vladimir et Estragon, se retrouvent au pied d'un arbre. Un dénommé Godot leur a, se rappellent-ils, fixé un rendez-vous incertain. Ils s'occupent en bavardant, en se débattant avec une chaussure trop étroite, en finissant leurs dernières provisions. Font bientôt irruption Pozzo, qui affirme posséder les terres alentour, et Lucky, qui lui sert de porteur et qu'il tient au bout d'une laisse. La fin de leur halte auprès des deux vagabonds est marquée par une longue logorrhée de Lucky, à qui Pozzo a ordonné de penser. Quelque temps après leur départ, un jeune garçon vient avertir Vladimir et Estragon que Godot ne viendra que le lendemain. C'est alors que la nuit tombe.

    Ainsi se déroule le premier acte. La pièce de Beckett en compte deux, qui se répondent terme à terme et répètent sensiblement les mêmes motifs. Quelques variations néanmoins sont introduites lors du second acte : l'arbre compte à présent quelques feuilles, Estragon est frappé d'une sorte d'amnésie, les deux clochards singent Pozzo et Lucky, lesquels réapparaissent respectivement frappés de cécité et de mutisme. Après une nouvelle visite du jeune garçon, qui affirme n'être pas venu la veille et les informe que Godot diffère encore leur rendez-vous, Vladimir et Estragon envisagent de se pendre, puis y renoncent. Les dernières répliques de la pièce sont au mot près celles de la fin du premier acte : VLADIMIR.- Alors, on y va ?/ ESTRAGON.- Allons-y./ Ils ne bougent pas./ RIDEAU.

    Parler pour tuer le temps        

    À une progression linéaire traditionnelle, En attendant Godot oppose une construction binaire dont la répétition suggère un cycle ininterrompu. Les notions de commencement et de dénouement s'effacent de la structure théâtrale, pour laisser place à une dramaturgie du temps, un temps non mesurable, sans repère chronologique fiable. Toutes les allusions au passé des personnages (l'âge que Pozzo donne à Vladimir et à Estragon, le souvenir vague de vendanges dans le Vaucluse) se prêtent au doute. C'est ainsi que s'opère un renversement des conditions du drame : aucune intrigue ni action unifiée ne s'inscrit dans le continuum temporel ; c'est le temps lui-même qui occupe la représentation tout entière, à tel point que la situation des personnages mime l'absurdité de celle du spectateur. Il s'agit, là aussi, d'attendre que rien n'arrive.

    Beckett ne cesse d'ailleurs, à l'aide d'une théâtralité outrancière, de souligner l'artifice et la fragilité des conventions d'un tel processus : Vladimir demande à Estragon de lui « renvoyer la balle de temps en temps » ; l'entrée de Pozzo et de Lucky multiplie les effets clownesques (cris, bruits et chute) ; le soliloque de Lucky donne du monologue classique une version déstructurée et inintelligible ; enfin, comble de la mise en abyme, Vladimir et Estragon, en mimant les deux autres protagonistes, réinventent le théâtre pour tuer le temps.

    Cette mise à l'épreuve des lois de la représentation dramatique l'emporte sans doute sur la portée philosophique d'En attendant Godot. La proximité de la Seconde Guerre mondiale a contribué à identifier dans la pièce le paysage mental du cataclysme passé, une réflexion sur le monde contemporain privé de transcendance, sur la misère de l'homme sans dieu. Le texte lui-même joue sans cesse de la double entente et invite à saisir çà et là des références à l'histoire sainte (Le Christ et les deux larrons), ou encore au mythe d'Œdipe (Pozzo devenu aveugle). De même, certains indices tendent à caractériser les personnages dans les termes d'un dualisme schématique : Vladimir semble tourné vers le spirituel tandis qu'Estragon apparaît préoccupé par son corps.

    Mais la dramaturgie beckettienne s'acharne précisément à miner, à mesure même qu'elle semble en poser les fondements, tout édifice herméneutique. L'abondance des interprétations possibles, au demeurant toutes équivalentes, finit par épuiser la tentation du sens, que les signes du texte avaient fait naître. 
© Encyclopædia Universalis 2005, tous droits réservés


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