580 UN DEBAT : LES MENTALTTES COLLECTIVES
courants d’opinion juridiques. De 1460 jusqu’au milieu de XVIIe siecie, les grands boyards de Yalachie se rattachent dans leur majorite & un courant d’opinion favorable a l’obtention d’une clause insćree dans les actes princiers de confirmation d’un doniaine et leur garantissant l’exonó-ration de l’exercice detout ćyentuel retrait princier pour clause de felonie (upradalica sd nu fie»). Au XVII1 siecle, le regime nobiliaire se distingue par un courant d’opinions en faveur d’une «lćgalitć feodale» a&surće surtout aux grands boyards (en cas de felonie plus particulieiement) par une scrupuleuse application de la prarila byzantine et par un enraye-ment de l’arbitraire de l’autocratie princiere. Si la mentalitć est souvent dśfinie par une simple epithete du genre : pessimiste, dynamiąue, baroąue, etc., il n’en va pas de nieme lorsqu’il s’agit de caractśriser un courant d’opinions.
La notion de mythe se revele d’un usage k la fois indispensable et delicat pour 1’historien du droit. U y a, tout d’abord, le probleme fondamental de l’epoque des origines ou la notion de justice, le sy&teme de droit et 1’action en justice ont une structure mythiąue, le mythe etant & la fois une modalitć de penser, d’assiniiler la realite (lume ce guidea, in basme ~ basm — mythe, Eminescu) et une teehnique d ’ organ is< tion (telle, par exemple, la fonction m.vthique du sccptre primitif, destinć & capter la rćvelation divine qui se transforme en jugement du basileus-juge) et de maitrise de la realitć aussi connue.
L’historien de la pensee juridique dans la Grece antique eonsaerera toujours son premier chapitre aux structures et va?eurs juridique;> de la pensće mythique, & la mentalitć axśe sin le mythe de la dilce. f”est par contraste avec ce mythe que se produira, d’un cótó, la rćvolution du nomos dans la polis historique et celle du nomos et de la dikś laicisćs, dans un monde ou l’homme serait la mesure de toute chose (Protagoras).
Mais ce sera surtout l’historien des mentalitćs qui devra tenir compte des retombćes ou des survivances mythiques dans les Massener-scheinungen d’une ćpoque plus tardiye. La pensće religieuse, l’idealisme, le mysticisme sont insćparables de certaines structures ou manipulations mythiques, sous des formes dćyiśes ou dótournćes. La rśference de la mentalitś juridique śyoluće & une justice diyine, k un droit naturel anhis-torique et non documentable, etc., introduit dans la vision du monde respeetive un mćcanisme mythique qui peut avoir le gros dćsavantage de ne pas fonctionner d’une maniere harmonieuse et fćconde, parce qu’il n’est pas insóró dans mi ensemble rćellement soumis aux lois du mythe.
J’en reste 1& d’un problóme immense et passionnant que l’on ne peut expćdier en quelques phrases rapides. Je notę, pour conelure, la fonction mythique confćrśe de bonne foi ou par manipulation idt$ologiquer k certaines structures ou yaleurs rationnelles et empiriques du droit et de la justice : c’est le positivisme mythologique. 11 y a aussi un yeritable dśtournement de langage, par exemple lorsque les ennemis de la libert6 se mettent k parler du « mythe de la libertć », pour en ćbranler les fonde-ments. L’historien du droit deyrait 6tre k meme d’anaJyser la rćalit<* du droit dans le mythe et de conjurer le danger qu’il y a & rćduire le droit k un « mythe du droit ».