13 UN DEBAT : LES MENTAUTES COLLECTIVES 585
ne peuyent £tre aperęus qu’en niettant en rapport un representant de eette sociśtś avec un autre monde »L
En effet, de tels tśmoignages ont śtś rćdigśs dans une vision forcó-ment Bubjective et fragmentaire mais bćnśficient en mćme temps de la spontanóitś des contacts directs et du eliniat de detachement dans leąuel ils ont śtć saisis. Ee ee fait, si nulle altśration n’est intervenue pour des raisons d’opportunitś on par le conventionaIisme inhćrent & toute rćyision ultćrieure du texte, ils eonstituent des sources d’une valeur inestiraable pour ceux appliąućs & dścouvrir les mentalitćs propres k une soctótć autre que la leur, et k laquelle nulle obligation ne les attache, leur permettant ainsi de les juger avee davantage d’objectivitć, sinon de competence. Par le spścifique des donnćes qu’ils apportent, ces rścits yiennent complśter la grandę yarićtć des aspects qu’offre la si complexe ćvolution de 1’espace sud-est europóen oii a la eulture hćritće de 1’ortho-doxisme byr.antin s’ćtait superposóe celle implantće dans 1’Orient musul-man par 1’instauration de la domination ottomane, sans compter en jilus les ślements captćs du lointain Occident latin. Ils vont contribuer donner une yision d’ensemble d’une suitę d’images dont la reconstitution s’ayśrait malaisće par les seules sources conventionnelles composćes de chroniques partisanes, conespondances officielles, pttces de chancellerie, littśrature juridique ou canonique et autres, qui n’en refletaient que les aspects partiels et particuliers.
Placśs sur des positions fort inegales dans 1’hierarchie sociale et dćtenant des fonctions ou exeręant des professions des plus diyerses — aliant de la noblesse de cour, diplomates, clercs missionnaires, gens d’epće, sayants ou artistes jusqu’& des commeręants, artisans ou acteurs ambulants, venus de tous les coins de 1’Europe ou de la lointaine Asie, ces yoyageurs restent tributaires de leur position de classe, aux suscep-tibilitśs ńationales et religieuses et au niveau culturel qu’ils auront atteint, dans les rćcits qu’ils donnent sur les rćalitćs peręues dans le vaste et complexe univers de ce monde balkanique et roumain. La yaleur de leur tćmoignage varie suiyant son authenticitć et du degrś de sincćritć, d’exactitude et de la capacitć d’information et de sślection de leurs auteurs.
En distinguant dans le micro-cosmos que constitue 1’espace du Sud-Est europśen trois entitćs — assurćment en corrćlation et ćtroite interdśpendance — c’est-&-dire le monde des « dominateurs » (dans lequel se placerait la sociśtś ottomane d’obedience islamique vivant dans l’śclat de la mćtropole imperiale, mais aussi l’« ćlite <> grecque gravitant autour de la Patriarchie constantinopolitaine et des fondations ecclósiastiques et culturelles de la Pćninsule et de 1’Archipel) ensuite la masse * des « dominćs » (comprenant les populations chrśtiennes des Balltans sous la fćrule de la Porte, mais toujours eonscientes de leur passś et de leurs tradi-tions slavo-byzantines) et enfin, cet uniye^s distinct roumain (dófini par un rćgime de relations « spćciales » ayec les ottomans et le syncrćtisme original entre l’Orient et l’Occident, entre l’orthodoxie et la latinitó),
on sera k m6me de discerner le spśeifique des relations laissees par les
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1 N. Iorga, Les uoyagcurs franęats dans UOrlcnt euro pień, Parls, 1928. p. 5 et 6.