622 UN DEBAT : LES MENTAJLITES COLLECTWES
quant nettement cette meme coupure 27. A Sparte, par contrę, ces dis-tinctions se brouillent, car, seule avee Tarente, la citś lacódśmonienne pratiąue systćmatiquement des funćrailles & 1’intćrieur meme de 1’espace politiąue. A Tarente, l’explication ancienne de cette singularitć Itait plutót neutre : on racontait, en effet, qu’un oracie avait prćdit la prospć-ritć aux Tarentins « s’ils ehosissaient de vivre avee les plus nombreux * 2% mettant en jeu les associations usuelles entre la ricbesse et le monde souter-rain29. Au demeurant, l’explication moderne est, elle aussi, neutra-lisante, car on fait śtat du dóyeloppement topographique de la yille qui aurait trouvś une explication postfactum dans une lćgende 30 — en oubliant qu’ailleurs en Grece un meme fait pouvait trouver des Solutions diffś-rentes, aliant de 1’oubli pur et simple de l’affection funśraire d’une zonę ultćrieurement construite aux cśremonies de purification : ce sont les Atbśniens prćcisćment, qui ont netoyć et « rćsacralise » 1’aire dólienne 31.
A Sparte, les motiyations ślaborśes qu’attribue Plutarque k cette premiere loi de Lycurguć concernant les morts trabissent une perplexitó manifeste dans l’abondance meme des prćcisions que 1’śrudit biographe enregistre : le lćgislateur aurait voulu ćliminer toute crainte superstitieuse (deisidaimonia) au sujet de la mort et de 1’impuretś, miasvia, « qui s’en-suivrait du fait d’ayoir touchć un corps mort ou d’avoir passe entre des tombes »32, pour habituer les jeunes £ la contiguitć de la mort et pour faire des morts et des yiyants, ensemble, des suntrophoi. Cette familiaritć — au sens propre du mot, ou presque, et qui rappelle par son etymologie la commensalitć si typique k Sparte — cette contigultś avec la mort, semblo etre un hćritage archaique (la fondation de Tarente doit etre considśróe un terminus antę quem de cet usage) intćgre au syst^me de comportements et reprśsentations propres & la citć des horr.oioi. U n’en reste pas moins que le resulltat de cette politisation des mentalitśs par l’idśologie met en jeu des images de la mort qui s opposent, sur bien de points, aux attitudes mentales communes en Grece.
Cette singularitć ćclate dans les rites funóraires des rois de Sparter qui dćconcertaient Hśrodote au point de lui faire dire que des Lacćdś-moniens ont, pour la mort de leurs rois, les memes coutumes que les Barbaręs d^siei)33.
37 Cf., e.g., 1'alternance des Thćsmophories; faut-il remarąuer aussi que c'est une fćte des femmes?
38 Polyb., VIII, 30, 2.
33 Cf., e.g., Aesch., Prom., 804; Soph., Antig., 1200; Eur., Ale., 360; Herc. Tur., 808; Alistoph., Pluł., 727 ; Piat., Cratijl403 A ; Luc., Tim., 21.
30 F. G. Lo Porto, Topografia antica di Taranto, in Taranto ncllacioiltó della Magna Grecia, Atti del X conoegno di studi sulla Magna Grecia (Taranto, 4—11 oct. 1970), Napoli 1971, p. 343—383 (pour la nćcropole et son «interprćtation • v. p. 379 sq., avec des rćfćrences k P. WuUleumier, Tarante des origines a la conquite roinaine, Paris, 1939, 250; N. Degrassi, s.v., Enc. Arch. Ant., VII, p. 608 sqq.
31 Thuc., III, 104.
33 Plut., Lyc., 27.1. Observons 1° 1’insistance sur les neoi: les «beaux morts » spartiates sont — comme aussi les hćros homćriques — invariablement jeunes (cf. Nicole Loraux, HBH et ANDPEIA, cit., p. 14); 2° la familiaritć avec le sóma, correspondant k la conservation des corps, au moins pour les rois (cf. infra. p. et n. 39).
33 Hdt., VI, 58sq.