Linguistique historique

Linguistique historique et comparative

Carmen GARABATO

L’histoire des langues englobe autant leurs caractéristiques internes (phonétiques, grammaticales ou lexicales) que leurs caractéristiques externes, qui définissent la place que les langues occupent dans la société. Les grandes transformations des langues sont toujours en lien avec les facteurs externes qui accélèrent et orientent le changement linguistique.

La linguistique historique est la sociolinguistique historique. Etudier une langue de manière isolée ne peut pas tout expliquer.

Virtuellement, n’importe quel document du passé peut devenir une source d’informations pour la (socio)linguistique historique, si nous savons reconnaître sa valeur, et si nous savons poser les bonnes questions à son égard.

L’inventaire des sources en (socio)linguistique historique est clos – et mis à part quelques surprises heureuses et ponctuelles- elles sont déjà connues. Dans la mesure où elles existent, elles existent en nombre limité. L’information disponible est toujours lacunaire, et lorsque les documents manquent, on se contentera de constater leur inexistence : il n’est plus possible de les créer.

Ex : une lettre d’un « poilu » (soldat de la guerre de 1914) de 1914. La lettre nous donne des informations sur ce qu’il s’est passé pendant la guerre. Il écrit en français mais à la fin, il écrit une phrase en occitan, qui montre la complicité entre l’interlocuteur et lui.



La linguistique romane au cœur de la linguistique historique et comparée

Parmi les langues indo-européennes, le latin a connu une fortune singulière : il est à l’origine d’une famille de langues (appelées romanes) dans laquelle s’intègrent le français, l’espagnol, le franco-provençal, le galicien, l’italien, le portugais, le roumain, le rhéto-roman, le catalan, l’occitan, le sarde…

Il est facile de constater les ressemblances entre les mots du vocabulaire courant des langues romanes :

Latin : facere/ français : faire/ espagnol : hacer/ italien : fare/ portugais : fazer/ roumain : a face

Le groupe des langues romanes constitue un excellent laboratoire d’observation et un terrain privilégié pour la linguistique historique et comparée. On a des renseignements très précis sur leur langue-mère (le latin). L’évolution historique de plusieurs de ces langues est bien documentée (certaines sont écrites depuis le Xème siècle).



Une histoire passionnante :



L’histoire :

  1. D’un petit peuple à un Empire

Avant l’Empire romain : Le latin était une tribu de l’Italie, vers la fin du IIème millénaire avant J.C. L’Europe était dominée par une culture celte. La Fondation de Rome : -753. Ceci dit, à cette date Rome était encore enserrée entre deux grandes puissances : les Etrusques et les Grecs. Huit siècles plus tard, les romains ont conquis tous les territoires autour de l’Afrique. Dans l’Empire romain, on parle latin, mais quel latin ?

Il faut faire la différence entre le latin « classique » (celui des écrivains, des grammairiens) et le latin « vulgaire », celui du peuple. Les langues romanes sont nées du « latin vulgaire ».

Comment peut-on connaître le latin vulgaire ? Pompéi : détruite par une éruption en 79 cette ville a été momifiée par la cendre, de sorte que de précieux graffiti y ont été conservés.



  1. La « naissance » des langues romanes : VI-Xème siècle

L’Empire romain se désintègre. On voit apparaître des royaumes barbares. Le « latin vulgaire » continue à évoluer et à se diversifier alors que le « latin classique » reste figé (donc meurt).

Le latin « classique » est de plus en plus difficile à comprendre. Vers la fin du VIIIème siècle et le début IX le peuple ne comprend plus le latin classique… car il est trop différent de sa langue maternelle (le latin vulgaire qui a continué à évoluer librement).

Témoignage du Concile de Tours (813) : on demande au curé de prêcher en langue romane.



  1. Du XIème siècle au XVème siècle : plurilinguisme et tolérance linguistique

Le rapport langue-pouvoir n’est pas encore très fort. Les langues sont appréciées surtout par leurs qualités esthétiques (littéraires), par la culture qu’elles transmettent. Quelques exemples : voir carte Europe vers 1450 (annexe sur moodle).

Péninsule Ibérique : intégration de trois langues/ cultures (juive, chrétienne, arabo-musulmane) l’école de traducteurs de Tolède. Des troubadours (poètes qui composent les poèmes, jouent de la musique et chantent) polyglottes autour de la Méditerranée… Un poète italien qui compose et chante en 3 langues (mais pas dans sa langue) : Bonifaci Calvo (Gênes : 1253-1266). Il chante dans les langues qui ont du prestige (littéraire). Un poète provençal (Reimbaut de Vaqueiras : 1180-1205) compose et chante en 5 langues. Un poète catalan compose et chante en six langues (mais pas dans sa langue) : Cerveri de Girona : 1259-1285.



  1. L’époque moderne (entre le XVIème et le XVIIIème siècle) : association langue et pouvoir

Un roi utilisera la langue du royaume car la langue et le pouvoir vont ensemble. Les Etats européens occidentaux stabilisent leurs frontières. Il est nécessaire de prendre en compte les conséquences linguistiques de la découverte de l’Amérique, expansion au-delà de l’Europe. Au XVème siècle, les espagnols et les portugais se partagent le monde. La première grammaire d’une langue romane est celle d’Antonio de Nebrija (1492). Il va écrire une dédicace à la Reine Isabel de Castilla : « La langue fut toujours la compagnie de l’empire) : Association langue et pouvoir royal.

Création des Académies de la langue : l’objectif est de fixer et dignifier les langues (Accademia della Crusca 1528/ Académie française 1635/ Real academia espanola 1713).

La compétition entre langues « vulgaires » ex : H. Estienne : citation. Dominique Bouhours (1628). José Cadalso (1741). Ils critiquent les langues.

Mais le peuple reste analphabète et ne parle pas nécessairement la langue du roi (il parle picard, provençal, gascon, catalan, galicien, sarde, milanais… ou n’importe quel autre dialecte/variété.)



  1. Le XIXème siècle et le XXème siècle: Les « langues nationales »

L’alphabétisation s’intensifie : connaître la « langue nationale » devient un droit et un devoir (ex : loi Ferry en France). Et les autres langues « sans état » : -l’occitan, la catalan, corse, galicien, sarde, milanais, sicilien…



La linguistique historique : pourquoi ?

La linguistique historique contribue à une meilleure connaissance de l’histoire sociale des peuples et des nations. L’histoire d’un peuple ne peut pas se comprendre sans prendre en compte l’histoire de sa langue…












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