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une caracteristiąue temoignant de la moralite du groupe de refugies, la categorie des refugies en generał est dangereuse pour les autres de sorte qu’il faut alors les «marquer» des identifiants reels afin de les eviten dans un joumal local en 1928 on lit que les refugies devraient porter des bracelets jaunes, de sorte qu’ils soient reconnaissables et que les indigenes puissent les eviter. Nombreux sont les exemples de telles reactions, surtout dans des regions ou une cohabitation entre les indigenes et les refugies a ete imposee. Un exemple representatif constitue le cas de la cohabitation entre des indigenes, des refugies de Thrace orientale et des Pontiaques dans un bourg de la Macedoine centrale, apres 1’echange des populations, au debut des annees vingt (Karakassidou, 1992); la distinction des uns par les autres repose sur ou utilise des arguments qui relevent de 1’ethnicite de chaque groupe, de. la reclamation de la purete du nationalisme grec, en menie temps ou conformement aux mandats d’un developpement agraire. Dans ce cadre, une serie des strategies sont adoptees, comme le mariage interethnique, la privation des uns par les autres du droit d’etre grec, traites de berger idiot (pour les Pontiaques) ou de Bulgare, puisqu’ils parlent une langue slave (pour les indigenes). Pourtant l’anthropologue, a travers ces distinctions a caractere ethnique du domaine symbolique, reconnait les tensions creees dans le domaine economique par 1’utilisation ou 1’abus du pouvoir (Idem: 273). On sait que les indigenes craignant de perdre des surfaces obtenues par la nouvelle repartition des terres, apres le depart des Turcs, ont procede a des actions agressives (coupure de 1’eau courante dans les camps des refugies, intimidation des gens) pour obliger ces demiers a abandonner leur territoire (Idem: 268) 3. Dans un quartier d’Athenes, peuple par des refugies, une autre distinction s’imposera parmi les refugies memes en les separant en «retardes» et «developpes» selon le critere du lieu de leur provenance; les habitants de la ville de Smyme (Ismir aujourd’hui) se presentent alors comme beaucoup plus developpes que leur compatriotes de Cappadocie par exemple (Hirchon, 1989). Cette attitude a ete expliquee comme un effort de marquage social de 1’espace: «In tlie process of creating a spatial environment, of making spaces into places, the refugees appear to have used regional mapping as a means of orientation. Tlirough assigning a particular character to areas within the new settlement, they began to re-create a familiar mental landscape out of an unknown, uncharted expance. They apparently imbued the new environment with meaningful attributes, based on regional stereotypes, reinstating the social characteristics of their homeland areas.» (Idem: 25). Selon 1’auteur la differenciation qui se fait paimi les refugies a part le fait qu’elle repose sur des facteurs culturels comme les precedents, le critere economique fait apparaitre egalement regulatif de la vie sociale des refugies (Idem: 26, 27). La distinction enfin entre rćfugiesAndigenes dans la capitale ne peut pas etre vue separement du processus de 1’uibanisation massive de la ville par les ruraux dans les annees qui ont suivi rinstallation des refugies a Athenes et surtout apres I’exode rural des annees ‘50. Les refugies - dans les quartiers desquels ce travail a ete effectue -
3 D’autres exetnples representalifs du rapport des indigenes aux refugies, concemants la manipulation du pouvoir qui provient soit d’une difierenciation de la base materielle, soit de la supćrioritć numćrique des catćgories diverses, sont presentes dans les travaux de S. Damianakos (1989) et de G. Angellopoulos (1993).