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au gouvemement apres la guerre civile, essaye a 1’aide des capitaux efcrangers, de retablir son prestige au niveau ideologiąue autant qu’au niveau economiąue. Des mots comme «union», «democratique», «progressiste», «independant», disparaissent du language oflBciel contróle par le mecanisme educatif principal, (1’ecole), et sont remplaces par d’autres comme «national», «hellenique», «famille», «religion», «tradition», «purete» (Tsoukalas, 1986: 35, 36).
Dans notre cas c’est 1’opposition entre deux groupes dans le meme village qui a ete a la naissance d’une differenciation de leur expression politique. Nos hypotheses qui concement les raisons de 1’apparition de cette differenciation ont ete formulees plus haut. Nous allons exposer maintenant certaines des strategies identitaires suivies qui confirment ou declinent cette remarque. Lorsque deja en 1986 (3® generation) les candidats pour le conseil de la mairie se melent - des candidats d’origine thrace sont dans la listę de la droite et vice versa - les votes familiales se partagent (cas des Roumeliotes), ou soutiennent le parent candidat independamment du parti (cas des Thraces) (Tsibiridou, 1990: 269). Quoi qu’il en soit ces initiatives tombent a piat et les candidats sont plus tard deęus de leur decision precedente. Les femmes thraces qui ont effectue un maiiage mixte bien des fois suivent le choix politique de leur familie d’origine plutót que celui de leur mari (Idem: 269). Cette attitude temoigne probablement du primat de la filiation sur 1’alliance autant que de la non individualisation de la femme tant avant qu’apres son mariage.
Un autre lieu d’expression du comportement politique est le choix des noms dans les listes des candidats: ceux descriptifś qui renvoient a la naturę, «soleil», «creation», «concorde» expriment les conservateurs, tandis que des notions abstraites qui renvoient a la societe, «progres», «jeunesse», «mouvement de renaissance» appartiennent aux progressistes. II s’agit d’une differenciation en deux sortes d’ideologie dont l’une s’impose sur le pouvoir de la naturę et 1’autre sur la capacite humaine; l’une desire 1’ordre impose par la «nature», le «toujours vu faire», 1’autre vise au reversement de cet etat des choses.
La manipulation du pouvoir par les acteurs locaux avec 1’aide du pouvoir central a conduit a la differenciation de la base materielle et du statut dans le village. L’exemple suivant apparait caracteristique: le territoire de notre village n’etait pas toujours stable puisque plusieurs partages des terres y ont eu lieu de 1923 a 1961. Ce village voisinait avec un autre egalement peuple par des refugies anatoliens et par des Sarakatsans. L’interet pour les terres intermediaires etant important, cette region, en 1931, a ete cartographiee deux fois; dans une des cartes les patfirages semblaient appartenir a notre village de reference, dans 1’autre carte a l’autre village. Devant la cour de justice qui examina le cas en 1961, nos villageois perdirent ces terres puisque leur maiie avait volontairement cache la carte pour profiter d’une ofifre impoitante des terres de la part des autres a son propre profit. L’adhesion des Roumeliotes a la droite, comme c’est le cas du precedent, n’est pas seulement le produit d’une rivalite avec les detenteurs du pouvoir de 1’autre groupe; il semble que la droite etait le parti qui conrespondait a 1’ideologie des Roumeliotes qui reposait, entre autres, sur une sorte de clientelisme etendu aux rapports socioeconomiques. Le choix des Roumeliotes a correspondu plutót ou parallelement a une inertie culturelle qu’a une resistance aux autres (Tsibiridou, 1990: 302).