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Pour une ethnohistoire des frontiires
des Źtats africains
trop souvent nćgligćes, en particulier celles des anciens districts administratifs coloniaux de l’arri&re-pays africain, dćpourvu des instaUations et des agrćments de la vie modeme. Elle exige une connaissance pratique non seulement des langues locales africaines et de leurs dialectes, mais aussi des langues oflBcielles europćennes utilisćes de chaque cótć des fronti&res. Cette ethnohistoire ne peut etre menće h bien que si elle combine ou coordonne les connaissances de l’historien et d’experts de disciplines connexes comme 1’anthropologie et la socjologie. Bref, 1’approche ethnohistorique exige plus de persćvćrance que la perspective adoptće jusqu’ici. Mais cette approche nouvelle est possible*1 et, en fait, elle est indispensable k notre ćpoque.
Dans cette approche nouvelle de 1’ćtude des fronti&res des Ćtats africains, les expressions « ethnohistoire » et « fronti&res d’Ćtat » mćritent, pour plus de clartć, un bref commentaire. Le terme « ethnohistoire » signifie que 1’accent porte sur les populations, les collectivitćs, les socićtćs des rćgions frontalieres plutót que sur les fronti&res elles-memes; la description et rhistorique des traces ne prćsenteront d’intćret qu’& deux ćgards : d’une part, leurs rćpercus-sions sur les microcosmes constitućs par des rćgions relativement homog&nes par leur culture, mais d&chirćes par le tracć de fronti&res politiques; d’autre part, les rćactions de la population de ces entites culturelles au phćnom&ne du partage. Alors, le concept de 1’histoire reliera directement le prćsent au passć. Des cas soigneusement choisis permettront d’ćtudier en deux parties 1’histoire des rćgions retenues : la premiere traitera de la situation avant le partage et examinera dans quelle mesure on peut parler d’unitć culturelle; la seconde, se rćfćrant k des th&mes dont le choix aura ćtć mhrement pesć“, traitera globalement de 1’histoire du partage et de ses incidences pendant et depuis la pćriode coloniale.
Źtant donnć que l’existence des fronti&res n’aurait eu en elle-meme d’autre sens que de concrćtiser les limites de la zonę de juridiction d’Ćtats politiquement distincts, 1’ćtude des rćpercussions de ces fronti&res sur la population locale se ram&nerait en somme k examiner 1’incidence des diflfćrents rćgimes politiques, k voir comment chacun des groupes isolćs par le partage a
21. Voir notę 20 ci-dessus.
22. Un de ces th&mes, en particulier, a suscitć i l’exc&s 1’intćret des jeunes spćcialistes, notam-
ment ceux de la gćographie ćconomiąue et du commerce international; il s’agit des ćchanges frontaliers (que les autoritćs ąualifient de « contrebande »). Voir, entre autres : Mondjannagni, Mills, Thom, Collins (notę 2 ci-dessus) et O. J. Igue, « Źvo-lution du commerce clandestin entre le Dahomey et le Nigćria depuis la guerre du “Biafra” », Canadian journal of Afiican studies, vol. 10, nB 2, 1976, p. 235-258; E. K. Kouassi, « Les ćchanges frontaliers entre le Togo et le Dahomey », mćmoire soutenu pour le diplóme de 1’Institut d’ćtudes politiques de Paris, 1969, 166 p.; Dau Covu, « Ćtude des ćchanges interfrontaliers Rosso-Mauritanie, Rosso-Sćnćgal », Dakar, Facultć des lettres, dćpartement de gćographie, maitrise de gćographie, 1971.