ils sont sans cesse presents”). La rencontre est infectee par le virus de 1’Etranger, virus que nous appelons ici “tout ce qui est irrencon-trable”. Si nous croyons en raffirmation, possedant les forces de raphorisme, de Derrida qu’“A certain foreign body is here working over our household words”1, alors nous pourrons admettre que la philosophie remplie de la pratique de la deconstruction est une pensee tournee vers 1’acceptation hospitaliere (du corps) de 1’Etranger. Les deconstructions (le pluriel est indispensable), ce sont les philosophies de la rencontre hospitaliere reposant sur une ouverture de soi illimitee, le repoussement des limites de 1’espace accueillant l’invite.
La consequence de cet etat de chose est que le concept “ma maison” perd son caractere defensif et limitant (“ma” maison n’est jamais entierement la “mienne”, de laquelle — c’est la specifique et tres connue arrogance du mot “maison” — les autres sont bannis; ce n’est pas my home is my castle (la maison qui est mon chateau), parce que la maison est depuis toujours habitee par quelque chose qui ne m’appartient pas. Elle n’est “mienne” que jusqu’au degre ou elle n’est plus “mienne” et porte les traces d’une presence etrangere) et le maitre cesse d’etre le personnage dominant de cette scene (puisque la maison n’est pas la “sienne”, c’est pourquoi il devient lui-meme 1’hóte d’une force inconnue, il est reęu par ce “corps etranger”). L’irrencontrable est la nouvelle formule de la maison et de l’hospitalite. Dans ce sens, la pensee deridienne est aussi — et cela se voit tres precisement dans La Carte postale — une refle-xion ethique sur le theme de 1’amour en tant que formę radicale de relation avec 1’Autre / 1’Etranger, dont 1’intensite repose sur le fait que, ne perdant pas sa particularite, ne quittant pas la sphere de la difference, 1’Etranger se trouve in-corporer par celui qui aime, devient present comme dans “deux personnes”. C’est pourquoi
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J. Derrida: Fors: The Anglish Words of Nicolas Abraham and Maria Torok. Trąd. B. Johnson. In: A. Torok: The Wolf Man’s Magie Word: A Cryptonymy. Trąd. N. Rand. Minneapolis, University of Minnesota Press, 1986, p. XXV.