2 La typologie des personnages nothombiens
Amćlie Nothomb peuplait souvent ses romans de personnages dćcalćs ou completement tarćs. Elle avoue qu’ils sont «la projection de quelque chose qu’elle ressent »2 en soi-meme. 11 parait que cette projection a une action thćrapeutique sur Pćcrivain qui parle souvent, dans les entretiens, de ses manies et leur sublimation dans son ćcriture. Si nous nous permettons une simplification, nous distinguerons deux types de personnages constitutifs dans le monde romanesque nothombien qui est dćformć, paradoxal, anti-sentimental et cruel. Ce sont les archćtypes du Monstre et de la Belle sous plusieurs incamations aussi diversifićes que frćquentes.
Autant la gammę des « Betes » monstrueuses est variće, autant 1’image archćtypale, omniprćsente chez Nothomb, de la Belle qui incame la beautć absolue, semble uniforme.
Les romans autobiographiques vćnerent la beautć de la soeur et de la mere de 1’auteur. Les petites filles y ont une position exclusive : «Juliette etait l 'incarnation de la poesie. »3 Or elles reprćsentent un comble de la beautć fćminine : Elena du Sabotage amoureux touche Pessence de la beautć humaine - le sublime. Chacune des Belles nothombiennes possede cette qualitć : seule la beautć sublime suscite 1’amour et la dćvotion totale. La poćsie de cette sublimitć fait rever son entourage. L’hćroi'ne du Robert des noms propres Plectrude est une enfant-Dieu douće pour se faire aimer. Son regard fixe fait pleureur les autres enfants. Sa mere adoptive avoue que « Nicole et Beatrice lui inspirent une tendresse debordante; Plectrude lui
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inspirait de la \eneration. »4 Ce sont avant tout ses yeux immenses « d’une beautć invraisemblable » qui font penser au reve, au sublime et a 1’absolu.
De 1 entretien du 28 septembre 2001 pour Fluctuat.net conduit par Franęois Haquet en collaboration avec Didier Hćniąue (http://www.fluctuat.net/livres/interviex/nothomb.htni) 4 Nothomb, A.: Metaphysiąue des tubes. Paris, Albin Michel 2000, p. 178 Nothomb, A.: Robert des noms propres. Paris, Albin Michel 2002, p. 24