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k la fois celle d’un savant, d’un diplomate et d’un pros-crit. Toutefois ce ne fut pas le projet, mais Hdće de l’arbitrage qu'il emprunta k Henri IV, et il en fit sim-plement 1’objet d*un appel aux puissances chrótiennes sans entrer dans des developpements.
Quatre-vingt-onze ans s’ćtaient ócoulćs depuisTou-vrage de Grotius, lorsqu’aprfes le Congres dUtrecht, ou il avait accompagnś le Cardinal de Polignac, 1 abb6 de Saint-Pierrc publia le lirre a«quel il donna le titre trop presomptueux de projet de paix perpeluelle, et qu’il dedia k Louis XV : « Ce projet, disait-il dans sa « dćdicace, contient des moyens simples et efficaces « pour pacifier 1’Europe et pour rendre la paix dć-« sormais perpćtuelle, c’est Tadmirablc projet de Henri « le Grand, un des plus fameux et des plus estimables « de vos aieux. »
L’abbć de Saint-Pierre avait raison de faire remon-ter k Henri IV 1’idde civilisatrice de Tarbitrage inter-national; mais il s’abusait singuliferement en croyant lui avoir donnó une formule simple k suivre et un but pratique k atteindre. Telle ne peut etre l’impression produite par son ouvrage, quand on lit les moyens par lesquels il croyait garantir dćsormais les princes des attaques du dehors et des róvolutions du dedans, et quand on le voit poser comme condition nćcessaire et prćalable k Tdtablissement de la paix perpetuelle la nścessitś d’une guerre acharnee k faire aux Etats recalcitrants.
En meme temps qu’il voulait recourir k ces moyens d'une sanglante intimidation, il ne mćnageait pas ceux de la sćduction et avait imaginś de rdussir a cet ćgard aupres des princes et de leurs ministres, en permettant
aux uns de disposer pour leurs dćpenses personnelles et domestiąues de la moitić des óconomies qui resul-teraient de la suppression de la guerre et en promet-tant aux autres des pensions pour les indemniser de cette suppression.
Dans son ouvrage 1’abbć de Saint-Pierre avait remuó bien fles idees. Plusieurs ćtaient celles d’un sagę, mais plusieurs aussi n etaient que les illusions d’un homme de bien ou celles d*un utopistę qui se met k la recher-cbe en ce raonde de 1'application de 1'absolu. Ce fut aux secondes pourtant qu’il dut dabord sa cćlćbritć par suitę des critiques satiriques qu’elles souleverent contrę lui, tandis que les premi&res passferent jusqu*i ces derniers temps (1) pour ainsi dire inaperęues et notarament celle de 1'arbitrage international qu*on ne sut pas assez dćgager des consóquences absolues qu'il entendait lui donner.
Parmi les cinq articles (2) dont se compose son
(1) La cćlćbrilć que 1'abbe de Saint-Pierre n’avait due qu’au superbe dćdaio de 1'espril satirique de son ćpoque. il la doit aujour-d hui a l esprit plus reflechi de la nótre. Notre confrćre, U. Louis Reybaud, lui a donnć place dans sa reraarąuable galerie des rófor-mateurs moderncs, et deux autres membres de cette AcaJemie, MM. Baudrillart et Lćonce de Larergne, ont publie sur son ouvrage et sur sa vie leurs s^raales cl consciencieuses apprecialions.
(2; Voici le texte dc ces cinq articles :
« 1. — 11 y aura dćsormais entre les sourerains qui auront signó les articles suivanls une alliance perpćtuelle... lis sont comemis de prendre pour point fondamental la possession actuelle et l'exćculion des derniers traites, cl se sont rćciproquement promis, k la ga-ranlie les uns des autres, que cliaque sourerain qui aura.signe ce iraile fondamental sera toujours couserve, lui et sa familie, dans