RESUME
Trois types de changement de regime ont etć identifies parmi la vague de revolutions de 1989 en Europę centrale et orientale, soit (1) des transitions negociees en Pologne et en Hongrie, (2) des rćvolutions non-violentes en Tchecoslovaquie et en Republique Democratique Allemande (RDA), et (3) une revolution violente en Roumanie. S’il est facilement concevable que les regimes rćformateurs qu’ćtaient la Pologne et la Hongrie aient opte pour la voie de la transition negociće, la Tchecoslovaquie, la RDA et la Roumanie avaient refuse la voie des reformes. C’est pourquoi cette recherche s’attache a expliquer les differences dans les processus revolutionnaires de la Tchecoslovaquie et de la Roumanie. Plus precisement, pourquoi la Revolution roumaine a-t-elle pris une formę violente, alors que la Revolution tchćcoslovaque prit la formę d’une revolution non-violente ? Dans le but de combler certaines lacunes de la litterature sur les changements de regime de 1989, et suivant Padoption d’une approche thćorique stato-centree et historique, Pobjectif est de proposer une analyse comparative empiriquement detaillee des differences entre les processus
revolutionnaires de la Tchćcoslovaquie et de la Roumanie, fondee sur des continuites historiques entre les periodes prćsocialiste et socialiste, et axee sur les differences entre les regimes etablis dans chacun des pays. L’argument defendu dans le cadre de cette recherche est que 1’heritage prćsocialiste specifique a chacun des pays a favorise Pćtablissement de diffćrents types de regimes socialistes en Roumanie et en Tchecoslovaquie en 1947-1948, ayant subsequemment evolue dans des directions differentes pendant la periode socialiste face k des pressions intemes et extemes. Une combinaison de caracteristiques de ces diffćrents regimes (leadership, dćclin idćologique et legitimite, capacite rćpressive, force de 1’opposition) a donnę lieu a des dynamiques specifiques de defection et de coalition durant les processus
rćvolutionnaires, ayant etć decisives pour rendre les processus revolutionnaires non-violent dans le cas de la Tchćcoslovaquie et violent dans le cas de la Roumanie. Cette recherche se presente ainsi comme une tentative de lier structure (causes eloignees) et agentivite (causes de proximite), par le biais d’une structure argumentative s’apparentant a la stratćgie intćgrative de 1’entonnoir (funnel strategy), ou le point de mirę est graduellement resserre du niveau macro au niveau micro.
Mots-cles : revolution (1989), processus revolutionnaire, rćgimes, Tchecoslovaquie, Roumanie, violence contre-rćvo!utionnaire, sociologie historique