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GOUDEMO, assis, palabre avec Soledad pour faire venir les esprits et effectuer son rite de desenvoutement. U prononce les mots humblement, avec douceur. II parle comme les vieux sages d’Ąfnque : La solitude n’est pas Pindifference. Alors que Pindifference assassine, la solitude redonne vie. La solitude volontaire et non Pexclusion. La volonte de se retrouver et non Pexil. La force de puiser dans ses racines une seve nouvelle. Le courage de ne compter que sur soi-meme. Et de tenir par les comes le risque de vivre. Meme s’il faut faire du rodeo. Meme si le blizzard s’abat sur notre corps et si la canicule nous derobe notre ame. Lutter, mais garder a tout prix cette vie qui est en nous parce qu’elle n’a pas de prix, parce qu’il n’y a pas de mots pour la proteger. Au-dela des mots, je repousse une fronti&re de si lence. Un vide sonore rempli de milliards d’atomes verbaux. Une machinę a devorer le bruit. Un instrument pour extraire la solitude comme un poids que Pon depose, delicatement. L’interieur d’une capsule extraterrestre. C’est un monde inconnu, inconscient. II est dans tes songes. On Pexplore en Pimaginant. Et pourtant, il existe róellement. II est en toi, dans tes tripes, ton sang. Les autres en parlent, se taisent, se tuent pour lui, ou s’y complaisent. C’est un feu interieur, qui brule notre ćlan vital. C’est ce que Pon ressent couler dans ses veines, lorsque Pon a tres froid ou ce qui bat nos tempes lorsque Pon a tres peur. C’est davantage qu’une chaleur. Une recette de jouvence ou Pelixir de la sagesse, un philtre de notre romance ou les liqueurs d’une jeunesse... C’est le revers d’une mćdaille corporelle. Un aven mystórieux, une grotte aux elfes, un antre pour magiciens ensorceles, le sol fertile a Pingeniosite. Un lieu de prestidigitations sensorielles, spirituelles et intellectuelles.
Au-dela des mots, je sens Pinvisible univers de tes sentiments. L’inviolable tombeau du moi et le toi secret de ta pyramide. L’emotion est au subjectif ce que le sable est au desert. L’attachement est Pobjectif de nos sentiers qui s’entretissent. Au-del^ des mots, je vois une ombre. Une nuit obscure sur une terre sans peuple. Une plaine abandonnee par la raison humaine, un refuge pour Phostiiitć, un terreau pour le chiendent de la cruaute. Ce desert d’incompróhension aride, c’est Pautre; Pćtrange qui est en nous. L'etranger que Pon rabaisse, que Pon meprise. La phobie, c’est la porte muree devant le palais du dialogue. Un