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avant cuisson 1 es formes ouvertes pour qu'on puisse les suspendre aux murs : il n'existe pas encore de meuble vaisselier. II lui faut connaTtre la formę et la taille des fromages pour faęonner les faisselles. Au XVIIe siecle, la faisselle de terre - d’apparition tardive - ne porte aucune tracę de finition. C'est le plus mai tourne de tous les pots de l'inventaire. II faut penser, sans doute, que les faisselles a egoutter le petit lait du fromage frais restaient confinees a la cave ou au cellier. Ou, peut-^tre, tout comme aux temps modernes, etaient-elles vendues avec le fromage, comme simple contenant jete aussitót que consomme. II lul faut £tre conscient du risque de bris des goulots de cruches, que le potier pose le plus haut possible au-<iessous de la levre, pour eviter une casse precoce et pour eviter les debordements* Ii lui faut s*adapter aux usages alimentaires : cruche a goulot etroit pour la conservation de 1'huile, pSte poreuse qui conserve la fratcheur dans les pots a eau. II lui faut connaTtre les us et coutumes des apothicaires, pour qui Pon cuit des albarelles ou des "boites" a pharmacie, petits cylindres bas a couvercle connus, dans Ifheraldique du XVe siecle, par les armoiries des Chirurgiens, posees "2 sur l, d'azur a trois boites couvertes d'argent”85. Les albarelles sont presents sur le site et une telle boite a ete decouverte dans un petit depotoir de la premiere moitie du XVIe siecle, a Essertines^.
Ces relations discemables dans le mobilier d'Essertines ne sont pas des cas isoles. Au XVIe siecle, les textes commencent a signaler l'intervention de 1'acheteur potentiel dans les fabrications ceramiques specialisees ou a usage professionnel87. En outre, la poterie est en elle-m$me la preuve d'autres formes d'activites industrielles et des relations entre les divers artisans, ceux de la metallurgie notamment. Le metier de potier en terre n*est pas une profession cloisonnee. Ce sont les creusets des fondeurs de metaux precieux, les appareils de distillation des apothicaires, les ustensiles des medecins, ventouses de terre bien connues par Piconographie, ou les ustensiles de l*horticulture, arrosoirs et pots de fleurs - m£me au Moyen-Age. De telles relations entre artisans ont peut-£tre aussi, anciennement, inspire nombre de decors des ceramiques des XIIIe-XIVe siecles. Le partage du corpus decoratif est en tout cas flagrant : les motifs floraux, presents dans l*orfevreric, ornant clousde ceinture et fermaux. Le poucier peint a Penglobe sur 1'anse d*un pichet n*est que Pimitation en applat des pouciers de pichets d'etain. Les anses coudees sont, d*abord, celles de marmites en airain. Les decors les plus courants sur les poteries medievales d*Essertines Basses, motifs ,łen pointę de diamant”, les molettes losangees ou a chevrons sont, egalement, ceux de la taille de la pierre^, Ce partage des motifs decoratifs avec d'autres corps de metier n*est pas un phenomene a negliger.
Mais le potier ne satisfait pas a toutes les demandes. Liee, sur le plan des mentalites, a la pratique usuelie de Tachat des rates de cuisson, il faut compter aussi celle des reemplois. A cet egard, le village d’Essertines est une micro-societe du remploi, Cruche brisee en deux hor izon tale men t et recuperee en jatte a une perlode ou la jatte n’appartient pas encore a rinyentaire du potier, fusaloles retaillees dans un tesson89.... Du XTVe au XVIe siecle, c'est une vingtaine au moins de ces fusaloles, disques, pesons, bouchons, ou jetons de jeux qui furent retailles, soit dans un fragment de tuile canal pour les gros objets, soit dans