La Seduction eludee ou Lettres de Monsieur VEveque de Meaux a un de ses diocesains, qui Jest sauve de la persecution, avec les reponses qui y ont ete faites et dont la pńncipale est demeuree sans replique3S7). Le parti exulte cTenthousiasme. Le silence de M. de Meaux est tout naturel, croit Bayle, puisqu’on lui avait repondu d’un air exact et net 358). Que ce semeur etemel de scepticisme ait attaque plus tard cette Seduction eludee 350), ne diminue en rien la valeur de sa premiere reaction: elle est tres grandę pour qui cherche a evaluer Tetendue et la profondeur de la renommee de Bossuet, d’autant plus qu,il avait donnę son suffrage a Jean Rou avant que Touvrage eut ete mis sous presse. II n’etait pas le seul. Claude et Jurieu avaient aussi pourvu le manuscrit de leur approbation. Mais c’est Bayle qui vainquit les scrupules de 1’auteur; il lui fit publier les noms et les dates en lui remontrant que les lecteurs seraient tout autrement curieux, s’ils savaient que cela regardait Teveque de Meaux 360).
Les catholiques vivaient des jours pleins d,anxiete. Tous leurs porte-paroles se taisaient. Nicole s’etait retire de la lutte. Arnauld etait decourage par le peu de succes de son Apologie pour les Catholiques, saisie a Rouen comme un livre pernicieux. A son tour Bossuet semblait maintenant garder le silence. La situation etait d’autant plus desesperante que, depuis plusieurs annees deja, les protestants avaient profite des persecutions en France pour obtenir du gouvernement hollandais des mesures d’oppression contrę les catholiques, et que ce silence semblait soutenir leurs affirmations. L’on soupirait apres la parole bienfaisante de Peveque de Meaux.
Celle-ci vint enfin. Tout le deuxieme chapitre de YHistoire des Varia-tions etait voue a cette matiere. Avec un grand appareil scientifique Bossuet y prouvait que les guerres civiles du XVIe siecle avaient un caractere foncierement religieux, puisque les protestants, devenus conscients de leur force, s'etaient opposes a la politique de Charles IX et de Henri III pour conquerir bon gre mai gre une place dans Tetat, et que les Eglises protes-tantes de France avaient formellement autorise cette revolte contrę le pou-voir legitime. Ainsi Bossuet reduisait a neant Targument qui avait fait le charme et la force de 1’ecrit de Jean Rou.
L’autorite des edits etait au moins douteuse; les doctrines protestantes sur Temploi de la contrainte variaient selon les besoins de leur cause; la braise de la revolte couvait ainsi toujours sous les cendres. Telles etaient les conclusions qui se degageaient de Tabondance des faits et des documents historiques. On s’empara en Hollande avec avidite de cette argumentation.
357) Berne-La Haye, 1686.
z**) Nouvelles de la Rćpubliąue des Lettres, janvier 1687.
S59) Reponse d'un nouveau convert\ d la lettre d’un refugie, 1689 (cf. Memoires inedits et opuscules de Jean Rou, p. 251, notę).
36<ł) Lettres de P. Bayle a J. Rou du 9 fevrier et du 24 mai 1686. (Ib., p. 253-254).
99