individuelle, qui, chez eux comme chez les disciples de Calvin, s’allie assez etrangement avec la suppression complete en theorie du librę arbitre humain110). Mais c’est Bossuet qui, achevant leurs efforts, a reussi a ranimer la controverse theologique. Malheureusement Tesprit vivifiant de la Contre-Reforme etait mort par suitę de ces memes efforts, au moment ou il remporta ce succes.
En depit de sa lutte commune avec les jansenistes contrę les protestants, Teveque de Meaux s’est toujours reserve le point de la grace et du librę arbitre. Le probleme Ta tourmente toute sa vie, mais son mysticisme lui a fait chercher des formules de synthese conciliatrices qui lui permettaient, au fond, de ne rien resoudre. S’il n’a pas trouve la solution pratique de Vondel, ce n'est pourtant pas sur le plan de la doctrine qu’il faut chercher la difference d’opinion avec le poete hollandais. On la trouve dans le domaine de la morale. Bossuet a toujours etc un moralistę severe. Vivant a la cour, ou regnaient 1’ambition, la cupidite et Thonnetete mondaine, il n’a pas eu beaucoup de confiance dans la naturę humaine. II a en horreur
la „vertu de commerce”, la „vertu des sages mondains, c’est a dire...... de
ceux qui n’en ont point, ou plutót...... le masque specieux sous lequel ils
cachent leurs vices” m). II a su neanmoins garder un equilibre raisonnable. Sa morale est celle d’un ascete, mais elle est pleine de mesure: c’est celle d’un realistę qui sait jusqu’ou la vertu moyenne peut tendre son effort. Rien ne nous le montre plus clairement que ses lettres de direction, ou il prie constamment les religieuses de passer sur bien des choses, sans trop les penetrer, et de ne pas se livrer a l’anxiete de se confesser. Et voici le sagę conseil qu,il adresse a Louis XIV: „Aimer Dieu, a un roi, ce n’est rien faire d,extraordinaire, mais c'est faire tout ce que son devoir exige de lui, pour Tamour du Christ qui le fait regner”112). II nous y rappelle les accents de Saint Franęois de Sales, dont il a recommande Ylnłroduction a la Vie devote comme un „chef d'oeuvre de piete et de prudence'', un .,tresor de sages conseils'’, un „livre qui conduit tant d’ames a Dieu,ł, et meme comme ,,1’abrege de toute la conduite spin^icHe^ 113). Ne nous y trompons pas! A Tinstar de tous les moralistes severes de son epoque qui font frequemment appel a la doctrine de Teveque de Geneve, il tend constamment a mettre un peu davantage Taccent sur la corruption de Thomme. Apres avoir loue Franęois de Sales il craint tout de suitę d'en avoir trop dit. „Oh mondains! ne vous trompez pas et entendez ce que nous prechons.
n0) A. Rebelliau, Bossuet historien du protestantisme, p. 30. ni) Sermon sur fhotineur du tnonde, 21 mars 1660, (Euvres oratoires, t. III, p. 352-3S3.
112) Instruction au roi, mai 1675, Correspondance, t. VII, p. 92.
11S) Panćgyrtąue du Bxenheureux Franęois de Sales, 28 dec. 1660, et Discours aux Visxtandines de Meaux, 30 juin 1685, CEuvres oratoires, t. III, p. 586, et t. VII, p. 274.
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