Nic. le Gros a rempli les rayons de la bibliotheąue d’Amersfoort. Or — nous continuons a demeurer dans le domaine du paradoxe — c’est ce chanoine qui a introduit ses oeuvres de spiritualite dans leur champ d’ob-servation. Elles ont servi a alimenter une polemiąue qui s’est pleinement epanouie a partir de 1730 et qu’on pourrait appeler la polemique de 1’orgueil. Apres avoir donnę asile aux refugies franęais, la Hollande accueillit encore les membres de l’universite de Louvain et les pretres de l’Archeveche de Malines, contraints de quitter les Pays-Bas flamands a cause des demeles sur la bulle Unigenitus 295). De plus en plus frequemment on y entendait les plaintes fieres des „persecutes” et des „victimes”. Ils se consolaient du sort qui leur etait echu, en evoquant le souvenir des persecutions que les chretiens des premiers siecles ont du subir. Ils etaient convaincus qu’une fois encore la ragę infemale des ennemis du Christ battait son plein. Certes, les portes de 1’Enfer ne prevaudraient pas contrę TEglise. Mais il n’avait pas ete dit que ces portes ne combattraient pas contrę elle (Insłructions sur les Promesses, no. 35). II ne fallait s’etonner de rien. De grands hommes, comme l’eveque de Meaux, n’avaient-ils pas dit que les disciples de la verite pouvaient etre persecutes et meme frappes d’anatheme par un grand nombre d’ennemis se parant a tort du nom et de Tautorite de 1’Eglise? U fallait toujours s’y attendre et s y preparer. II fallait meme etre heureux de pouvoir subir la persecution pour le Christ, puisque c’etait un honneur d’appartenir au petit nombre des elus qui maintenaient la verite dans
Inutile de dire que cet etat d’ame, cette conviction d’avoir reęu de Dieu la mission providentielle de defendre la religion contrę la foule des pre-tendus fideles, n’etaient pas faits pour les sauver de Tesprit d’opiniatrete et d’independance.
Dans cette phase ils se saisissaient aussi des ecrits gallicans de Bossuet 297). On devine aisement quelles armes ils en forgeaient. Leurs adversaires s’impatientaient. II fallait en finir avec Tabus du temoignage de M. de Meaux. Ce n’est pas un effet de la bonne doctrine, avait dit celui-ci, d^norgueillir les ignorants. Ce qui parait avoir ete unanimement admis par le grand nombre, n’est pas erreur, mais tradition. Que tout le monde s’en tienne a cette regle d’or de Tertullien. A supposer qu'on erre
295) En 1729. Cf. leurs Dóclarations (Verklaringen), editees a Utrecht, chez G. Le Febvre, 1730.
296) Cf. entre autres Zevende t’Zaamenspraak tussen den Pastoor en Harmen Boi, 1736, p. 116 sq.; P. H. Vlaming, De drie hoofdgeschillen tusschen de Rooms-Catholyken, 1741, p. 469 sq.
297) Nous les avons trouves mentionnes pour la premiere fois dans G. van Roost, De regte gronden van het Geloove, Hope en Liefde, t. I, 1731, p. 384 sq. (L’auteur y suggere meme que Bossuet aurait considere la conception ultramontaine comme heretique). La Declaration de 1682, elle-meme, se trouve mentionnee, bien que rare-ment, avant cette datę.
82