348 SAINTE-ANNB DAURAY I
le miracuie n’ayant pas rempli les obligations de son voeu, le mai rćapparait ou s'aggrave.
Toutes ces particularitćs, que nous signalons ici som* mairement, ont d’outant plus de force qu’elles nont pasete dictees aux temoins pour les besoins de la cause. La plupart de ces tćmoins etaient des gens du peuple, uniquement prćoccupćs de racontcr ce qu’ils avaient vu, et qui, dans leur sincdritć mfime, notaient sponta-nćment et sans calcul, les vraies caracteristiques de l‘intervention surnaturelle.
Le miracle de Sainte-Anne d’Auray au XVII* sifccle, comme celui de Lourdes k notre dpoque, porte avec lui, aux regards de tout juge impartial, son certificat d’ori-gine, impossiblea mdconnaltre.
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Apr£s 30 annees de manifestations presque quoti-diennes, on constata un ralentissement graduel dans les miracles; et ceux k qui manque la vraie notion du caract^re des interventions divines peuvent se deman-der si sainte Annę, devenue en apparence moins liberale, n’allait pas se retirer elle-meme de ce lieu‘qu'clle avait choisi...
Du reste, il est juste de le remarqucr, ce ralentissement n‘est jamais allć jusqu’A une interruption com-plfcte. Rien ne permet de dire que 1’fcre des miracles soit definitivement close & Sainte-Anne d’Auray. Nicolazic, sur son lit de mort, avait ddclarć k son confesseur qu’il s’y ferait daussi grands miracles dans lavenir que dans le passe (1). Et ses predictions se realisent toujours.
D ailleurs eussent-ils cesse d’une manierę complfcte, il ny aurait que les faibles k sen scandaliser; le Peie-rinage n'aurait subi aucun dommage de cet arrót defi-nitif. On venait k Sainte-Anne de toutes parts; la renom-
(1) P. Hugues, p. 450.
mće des merveilles qui s'y općraient s’ćtait repanduc jusqu’aux extrćmitćs du pays. Une fois ces rćsultats obtenus, le miracle, dont la Providence ne se sert qu,exceptionnellement, n’avait plus la mćme raison d'ćtre (1).
Et cctte explication se confirme par un rapproche-ment qui est lui-mćme un argument de plus. S'il est permis de passer du petit au grand, et de comparer 1’ćtablissement du Pćlerinagc avec les dćbuts du chris-tianisme, nous voyons, a 1'origine de l'un et de 1’autre, la mćme profusion de miracles suivie du mćme ralen-tissement progressif. La disparition des charismes ne prouve rien contrę l’origine divine de 1’Kglise ; pour la mćme raison, la cessation totale des miracles 6 Keran-na ne prouverait nullement que sainte Annę n'est plus ló. La rarćfaction des miracles, que certains tournent contro la croyancc au surnaturel, devient au contraire un argument singulićrement probant en sa faveur.
Cc qui gućrissait alors, c’ćtait, dit-on, la foi du malade, 1'intensitć de son dćsir, en un mot 1’auto-suggestion dont la mćdecine a tirć un parti si avantageux k n^tre ćpoque.
Qui ne voit du premier coup d’ceil le faible de cette objection! Aujourd’hui le malade est dans les mćmes conditions qu’autrefois, sa volontć de guerir est aussi intense, sa foi aussi vive, sa prićre aussi ardente; et pourtant il ne guerit pas! La suggcstion, autrefois si puissante, aurait-elle perdu son efficacitć. Est-ce que la Naturę n’obćirait plus aux mćmes lois?...
En mćme temps que les prodiges devenaient moins frequents, les gardiens du Pćlerinage y attachaient eux-mćmes moins d'importance, parce qu'ilsy voyaient moins d’utilitć.
(Ił «.Ouand nous plantons des arbustes, ćcrit saint Grćgoire, nous les orrosons jusqu’A ce qu’ils aient poussć solidemcnt leur radne ; et nous cessons de les arroser quand nous les voyons blcn pris. i* (Iłom. 29 in Śctng.)