13 Elias Habesci — 1’Empire ottoman 129
C’6tait un conseil qu’il ótait toujours pręt a suivre.Il aurait, semble-t-il, fait son apparition en Pologne en 1785, en compagnie d’un descendant de Scanderbeg64: encore une fois, on entrevoit un rapport avec 1’Albanie qui, sans nous etre tout a fait clair, se manifeste a\ec insistance. Cette nieme annee, il est question de lui dans une lettre du comte Vorontzov qui en fait un portrait assez inquićtant: «Tous les scelerats d’Italie, quand ils ne savent plus ou donner de la tete,disent publiquement qu’ils iront en Russie pour faire leur fortunę (...) Vous ne connaissez pas Gica Voici son histoire. II est batard du generał Gica, qui, apres avoir connu que c’est un mauvais sujet, 1’abandomia II se fit Iaquais, soldat, puis pretre, dans le regiment macedonien a Naples, ou il fit tant de friponneries qu’il fiUt obligć de s’enfiiire. II roula par toute la Grece et par 1’Albanie, d’ou, etant venu comine siniple soldat a notre flotte, s’insinua chez le comte Orłów, vint avec lui a Livoume, fiit maitre de langues de Mme Dćmidow, d’ou il sauta conseillcr d’ambassade a Naples. C’est le comte Razoumowsky qui m’a conte tous ces faits, qui me fiirent confirmes par le comte Mocenigo, qui l’a eu dans sa maison a Zante en habit de pretre sous le nom de Papa-Antonio, et lui fit des charites. II Ta vu apres a Paris, en habit albanien,et a Pisę, precepteur de la Demidow»6S.
Ce roman picaresque a-t-il comme heros le meme Alexandre Ghika dont on a vu les aventures a Constantinople et a Paris, et celui-la etait-il vraiment le pcrsonnage connu a Londres sous le nom d’Alexandre Ghika, mais signant «Elias Habesci» son ouvrage sur 1’Empire ottoman? Bień des elements de ces trois biographies sont complementaires,quelques-uns coincident meme - 1’auteur du joumai fait allusion a son experience de la Russie, episode que Veigennes connaissait aussi, et il parle 1’italien; dans The Present State of the Ottoman Empire il est question des «ancient illustrious families of Greece», dans le joumai aussi les familles illustres grecques» et dans les deux textes avec la meme rancune, explicable chez un fils naturel rejcte par ceux dont il reclame le nom.
Sur la troisieme de ces «vies paralleles», les recherches d’Ariadna Camariano et de Franco Venturi ont foumi une contribution precieuse, sans parvenir a eclairer tous les coins d’ombre6Ć. Le generał «Gica» serait Strati Ghika, officier superieur dans 1’armee du roi de Naples, ou il commandait le regiment Real Macedone, formę d’Albanais du Sud de 1’llalie67. Son fils, nomme pourtant Antoine (pas Alexandre!), auiaitpris une part active aux tentatives de soulever les Grecsa l’epoque de la guenre msso-turque de 1768-1774.
Auteur de productions poetiques en italien qui se voulaicnt un hommage aux Iiberateurs du Sud-Est europeen {Per li recenti fausti successi delle armi russe nella Yalacchia, Moldavia e sullTstro, ainsi que Allegloriose truppe moscovite), ce Ghika aurait etć recompense de ses services par le titre de comte et la fonction de conseiller d’ambassade. En 1777, datę de la mort a Jassy de son presume pere,
64 The Partition of the Dominions ofthe Pope, p. 61: «Iu the ycar 1785 I was acąuainted with a lineal descendant of Scanderbeg, in Poland, where be hau a very genteel asylum with a Polonese nobleman».
65 Arhiv kniazia Voroncovat IX, Moscou, 1876, pp. 33-34.
66 Ariadna Camariano, Yoltaire fi Giovanni del Turco tradufi in limba romdna pe la 1772 in In amintirea lut Constantin Giurescu, Bucarest, 1944, pp 175-182; Franco Ventilri, Settecento riformatore, III, Turin, 1979, pp. 117-127.
61 On comprend pourquoi le projet du duc de Luxembourg insistait sur les Albanais.