s’agissait d’une photo de Badrawi lui-meme. Parfois, je me demandais s’il n’avait pas invente ce cousin parce qu’il se plaisait a cette idee : mourir assassine. Quoi qu’il en soit, Papou etait persuade que ceux qui avaient tue son cousin le tueraient a son tour et aucun raisonnement, aucun sermon amical ne Iui ótait de la tete cette idee. La seule chose qu’il admettait, c’etait qu’il courait beaucoup moins de risques en Suisse que partout ailleurs. II avait la certitude que la neutralite suisse le protegeait comme un voi!e et que personne n’oserait commettre un assassinat dans ce pays. Muzzli essayait de lui prouver le contraire, et lui reprochait d’avoir accroche au mur de sa chambre le portrait du generał Henri Guisan. Mais Badrawi lui expliquait que le visage doux et paternel de ce militaire suisse qui nłavait jamais combattu et jamais tue personne lui apportait un grand reconfort et calmait son angoisse.
Ainsi, lorsque la nuit tombait, chacun de nous retrouvait sa solitude, Michel Muzzli son mal-heur d’etre suisse et Papou cette hantise de Fassassinat qui le faisait verrouiller la porte de sa chambre et se blottir au fond de son lit avec une tasse de the. Moi, j’allumais la radio. En tournant le bouton, millimetre par millimetre — un mou-vement trop brusque de Taiguille et il fallait recommencer —, je parvenais a capter sur les ondes moyennes le poste Geneve-Varietes. La, a vingt-deux heures precises, commenęait l’emis-
123