en place generale de la composition, comparable a la sinopia des fresąues medieyalcs. Certains motifs, dailleurs, ont probablement ete peints alors que Ie dessin en etait deja cacbe par un ton de fond (PI. LI).
Avec Ies coucbes suivantes. apparaissent Ies premieres operations de peinture : Tetablissement de tons de fond. Ceux-ci, disposes en principe conformement aux preyisions du dessin, situent, par leur valeur et leur ..densitć Ies plans de base de la construction spatiale et plastique, et londent, par leur repartition cbromatique barmonieuse, rćquilibrc decoratif (PI. XXIX). Ce nest que dans une pil ase ulterieure et en quelque sorte subordonnee, que se superposeront Ies details, Ies accents d ombre et de lumiere accusant, par leur valcur propre, une saillie ou un creux par rapport au grand plan qui Ies situe dans Iensemblc. L execution commcnce donc par une pliase syntbetique pour se prolonger dans Ianalyse, alors que la vision semble etre partie de I analyse pour y deceler Ie facteur de syntbese : la lumiere. Toutefois, ceci s explique aisement par la necessite d assurer I unite de structure de I' ensemble. D autre part, Ie processus, en tant qu,operation mecanique, est peut-etre aussi vieux que I art de peindre. Son principe resulte clairement des recettes du moine Tlićopbile et domine tout Ie traite de Ccnnini. Mais ce qui, cbez Tbeopbile et Ies peintres romans, se reduisait au dessin des ombres et des Iumieres abstraites sur un ton moyen sest affine, a mesure que la yision saisissait davantage Ie caractere plastiquc des cboses, en un principe de super-position avec modeles de plus en plus delicats. Van Eyclc, perfectionnant encore pour rćpondre aux exigences croissantcs de la vision, multiplie Ie nombre de coucbes ; ii affine Ie jeu des tranparences qui s erige en principe fondamental, et ii n’est probablement pas exagere de dire qu il introduit dans la peinture medievale la ,.densite ’ comme moyen dexpression.
Les premieres coucbes, en couleurs couyrantes, fournissent un ton moyen, amorccnt Ie clair obscur eyentuel et assurent la densite de base, toujours si puissante cbez van Eycb, qui recbercbe une transposition des qualitćs tactiles des matieres dans une masse puissante et emaillće. Vient alors, d une faęon prcsque generale, un jeu de coucbes translucides qui terminent la misę au point. Sans doute s’agit-il bien ici de glacis, mais ii ne faudrait pas que ce ternie permit des confusions : ces coucbes nc sont en aucune maniere des reprises, des corrections ; elles sont partie integrante du processus d ensemble, sont preyues ab initio, comme Ie moyen tecbnique normal d obtenir un ton, une transparence, une densite deter-minee. Enfin, elles sont elles-memes modelees, au point d atteindre, dans certaines ombres, une epaisseur considćrable, necessitee par la difficulte d obtenir des yaleurs sombres avec une matiere translucide (PI. XIX, 3).
A ce stade sont acbeyes Ies drapes et, en generał, toutes Ies parties qui n’exigent pas la superposition de dćtails.
La rigueur yraiment systematique du procede n’exclut cependant jamais la liberte, soit a 1’egard du dessin, soit en cours d execution (PI. XXXVIII). C est menie apres I apposition des premieres coucbes des tons de fond que I artiste etait Ie mieux en mesure de juger sa composition du point de vue pictural — ce qui restait delicat tant qu elle se limitait au dessin — et d y apporter encore Ies rectifications suggerees par la couleur. Citons, a titre d exemple, Ie remaniement profond des plans dans Ie paysage des Cbevaliers du Cbrist et Ies modifications dans la disposition des pattes des cbevaux (PI. XXV, XXVI, XXVII). Mais Ie cbangcment de conception Ie plus profond est certainement celui suryenu dans Tarcbitecture de 1’Annonciation. Cette fois, nous surprenons I artiste dans Ie fen meme de la creation. La premierę yersion (dessin) repetait la suitę d arcatures trilobees du registre inferieur, confćrant a rensemble une unitę purement d^coratiye, par une scansion yerticale
96