me l’unique realite authentique dans un monde en decomposition. Pourtant Malraux n’adherera jamais au communisme ni dans ces trois premieres ceuvres romansques - Les Conąuerants, La Uoie Royale et la Condition Humaine - ni dans son dernier ouvrage proprement lit-teraire - Les Noyers de lAltenburg -, les oeuvres les plus proches de la perspective communiste etant YEspoir et Le 7 emps du Mepris.
La revolution chinoise a pris aux yeux de Malraux une importance particuliere mais, comme 1’ecrit Goldmann:
»En parlant de la Chine, Malraux ne veut ni se refugier dans l’exotisme ne decrire une situation particuliere, mais parler de 1’homme universel et, implicitement, de 1’homme Occidental de lui-meme et de tous ses camarades«.43
La Chine, Canton, les greves et la lutte contrę 1’Angleterre repre-sentent 1’action historique et revolutionnaire universelle, 1’action libe-ratrice qui apporte a lhomme une nouvelle conscience de son exis-tence et de sa dignite. Si les masses chinoises et indochinoises consti-tuent 1’horizon de 1’action, trois figures incarnent l’ideal communiste comme autant d’elements distincts ayant chacun une valeur humaine dilierente: Klein, JBorodine, Nicolaiev. Klein est un militant devoue, sans reserve, etroitement lie au peuple. Borodine est le chef revolu-tionnaire, l’homme d’action, pour qui 1’action n’existe cependant que comme lutte contrę 1’oppression. Borodine est un revolutionnaire prolessionnel qu’on ne saurait transformer en homme d’etat. Nico-laiev, limite et robuste, policier eternel, ne peut que remplir des fonc-tion utiles et n’a guere de valeur humaine. Hong et Tcheng-dai, dans les principes de 1’action comme de la morale, incarnent le menie idea-lisme abstrait.
C’est 1’action qui permet pour Malraux d’echapper a 1’effondrement des valeurs, a la fascination de la mort et du neant, c’est la perspec-tive du communisme qui donnę la possibilite de justifier sa vie sans pourtant adherer a la perspective reelle pour laquelle il se bat. Mais 1’imminence de la mort separera definitivement Garine du mouve-ment revolutionnaire en le rendant a sa solitude originelle.
Dans la Uoie Royale le cadre generał du recit est la lutte perma-nente entre le neant informe incarne par la vegetation de la foret tropicale et 1’effort des hommes pour etablir des formes significatives. On voit se preciser la distinction entre l’Aventurier et le Conquerant. Tous deux sont unis par leur mepris des conventions et de la societe bourgeoise mais alors que l’Aventurier ne pense qu’a lui-meme, au style du personnage qu’il incarne, le Conquerant au contraire s’en-gage dans la lutte effective et subordonne sa vie a 1’ideal. Le sens de la vie tel qu’il apparait dans La Uoie Royale reside toujours dans l’ac-tion, seul moyen de depasser la menace du neant. Mais lorsque Ton meurt, ou que l’on va mourir, on retrouve le meme monde de l’ab-surde.
La Condition Humaine a aussi la revolution chinoise pour th&me et plus precisement le conflit qui oppose les revolutionnaires de Shan-
M S. R. p. 103.
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