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et notamment en Huronie apres 1640, divise la societe autochtone et suscite des conflits entre convertis et non conyertis45. Pour plaire aux missionnaires et prouver leur ferveur, les chretiens hurons refusent de prendre part aux rites traditionnels. Si le rite conteste fait normalement partie des fonctions d*un chef converti, on designe un adjoint qui conduira la ceremonie46. Les chretiens se retirent des reseaux sexuels : ils se marient exclusivement entre eu^7. Meme les guerres intertribales suscitent des divisions : les convertis hurons ne veulent pas combattre les Iroąuois aux cotes de leurs compatriotes non conyertis48. Jusąue dans la mort, la division dechire les communautes: les chretiens refusent de se faire enterrer aux cotes des paiens49. L'abandon par les chretiens des pratiąues traditionnelles d'entraide et de partage menace la solidarite familiale et suscite inevitablement 1'indignation des traditionalistes. Ces demiers tiennent le Dieu chretien et ses pretres responsables des malheurs de leurs nations et accusent les neophytes d'etre complices des missionnaires50. Contrairement a ce qui se passe dans la reduction, ou les infideles subissent la pression morale des convertis, les neophytes des missions huronnes font 1'objet de derision, d’agressivite, voire de menaces. Ds subissent la desapprobation de leur familie dont ils sont parfois chasses51, quand ils ne sont pas tues par leurs compatriotes52. Bref la societe traditionnelle est divisee en deux groupes, convertis et non convertis, ayant chacun ses propres dieux, ses propres rituels et un reseau de mariage de meme qu*un cimetiere distincts. La societe clanique autrefois relativement egalitaire, liberale, et unie n’existe plus.
45 En effet, les Autochtones sont inquiets face k roffensive missionnaire. Un chef huron du elan de ia Tortue. nomme Kondiaronk (appele aussi Adario chez les siens), dit que « Si ce que vous appelez son Evangile est veritablement de lui, il faut donc conclure que Dieu n’a parie sur la Terre que pour y exciter des Troubles et des Divisions [...| » (SIOUI, Pour une autohistoire 1989, p. 89, 94 ; TRIGGER Les Indiens et l!Age [...], 1978, p. 19).
46 THWAITES, The Jesuit Relations (...], 1959, vol. 28, 1644-1645, p. 86-88 {Relation du pćre J. LALEMANT).
47 Relations des Jesuites, 1972, vol. 5, 1644. p. 4-5 (Relation de VIMONT).
48 THWAITES. op. cit.% 1959. vol. 26, 1643-1644, p. 174-178 {Relation de VIMONT).
49 Ibid. vol. 23. 1642. p. 30 {Relation de J. LALEMANT).
50 Ibid, vol. 20, 1640-1641, p. 156 {Relation de LE JEUNE) ; Relations des jesuites, 1972, vol. 3, 1642, p. 62 {Relation de J. LALEMANT), 1643, p. 73 {Relation de VIMONT).
51 Relations des jśsuites, 1972. voI. 3, 1642, p. 66, 78.
52 11 s'agit du «bon Chrestien» huron, Joseph CHIHOUATENHOUA, et d*ANDOTRAAON. Voir Relation des jesuites, 1972, vol. 2. 1640, p. 97, 102-103 {Relation de J. LALEMANT); TRIGGER, «Chihouatenta». Dictionnaire biographiąue [...], 1966, voI. 1, p. 217-218; TRIGGER, Les Enfants dAataentsic, 1991, p. 700.