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Pedro de Luna sań aussi s’entourer de diplomates de talent. Les cardinaux et les eveques qu’il envoie aupres de ses rivaux romains ou du roi de France sont presentes par Michel Pintoin comme des hommes fort eloąuents143.
Dans notre analyse du regard porte par le chroniqueur sur la societe politiąue de son temps, nous avons jusqu’ici fait peu de cas des nombreuses sources ecrites, avouees ou non, sur lesquelles ii appuie souvent son recit. Pour la periode qui s’etend de 1390 a 1415 environ, le nombre et Fimportance de ces documents sont loin d’etre negligeables Grace a ses relations avec la chancellerie royale franęaise, Michel Pintoin a notamment pu tir er parti de rapports d’ambassades Pour raconter le deroulement des negodations franęaises avec le papę d’Avignon en 1395, ii a ainsi utiiise ia reiation redigee par Gontier Col, un des secretaires de 1’ambassade, qu’il a traduite en 1’abregeant. Par chance, une copie de ce rapport a ete conservee144. Le texte en a ete publie au XVIir siecle par Edmond Martene et Ursin Durand149. La misę en parallele systematique du recit du Religieux et du document dont il s’est servi est insuuctive: elle permet de constater que le chroniqueur, si prompt par ailleurs a reaffirmer son souci de faire bref144, a neanmoins senti le besoin de faire ressortir I’eloquence des protagonistes bien davantage que ne l’avait fait sa source. Voici par exemple comment Gontier Col rapporte le discours prononce par le duc Philippe de Bourgogne lors de la premiere audience accordee par Benoit XIII: "Adonc monsieur de Bourgogne respondit, et s’excusa qu’il n’estoit pas homme sagę ny clerc pour parter de si grant et si haute matiere a si haute et si 1407. le frere cadet de Charles VI est demeure, parmi les princes de France, le plus ardent partisan du papę d’Avignon (voir B. Gucnec. Un meurtre. une societe, p. 153).
143 Le Cardinal de Pampelune, envoye en France en 1398 pour center d empćcher la soustraction d'obćdience. est un "virum uiique facundum. in jurę crvili ezcellentisstmum professorem" (IL 572); il est ąualifie ailleurs de 'facundissimus" (IL 536). En 1403. le Cardinal de Poitiers prononce desant le Conseil du roi un fort eloquent discours: "Multum disertissime et luculentissime peroravit" (III. 88). En 1404. les ćveques de Saint-Pons et d'Ilerda. ambassadeurs de Benoit XIII aupres de Boniface DC s'expriment "e/egantissime" (DL 216).
144 B. Guenee. "Documents insćrćs et documents abreges". p. 383.
145 "Journal de 1’ambassade des ducs de Beny. de Bourgogne et d'OrIćans. ś Avignon auprts de Benoit XUL a. 1395". Amplissima Collectio. L 7, New York, Bun Franklin. 1968 [reimpr. de 1’ćd. publide a Paris par Montalanten 1724|,col 479-528.
144 Voir supra. p. 19 n. 11.