excita une violente colere chez Salvador: -Qu’est-ce que tu parłeś?... Est-ce qu’un bicot comme toi sait seulement ce que c’est qu’un taureau? [...] L’Arabe humilie baissa ses beaux yeux. [...] Pendant ce temps, Pierangelo faisait une scćne k Kadour, [...] qui etait venu s’asseoir au bout de table.
Les deux Arabes presents dans cette scene sont dans une situation de confrontation avec des non-Arabes: avec un Valencien, Salvador, et un Piemontais Pierangelo. L’appellation de 1’Arabe qui n’a pas pour I'instant de prenom : «un bicot», est injurieuse et, selon Calvet, raciste. Rappelons apres le meme auteur que ce terme apparait pendant la guerre de 1914 au moment de l’envoi des troupes africaines sur le front franco-allemand. A ce moment-la les Arabes deviennent des «arbicots» ce qui aboutira a une formę ulterieure «les bicots». Le Petit Robert donnę une autre ety-
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mologie de ce mot qui remonte aux annćes 1861-1892. Quand Jes emo-tions 1'emportent, les colons n’hesitent pas a humilier 1’Arabe. Kadour n’entre pas dans ce rang social qui lui permettrait de s’asseoir a table avec les charretiers, donc avec les gens d’une plus haute categorie sociale; on pourrait comprendre 1’indignation de Pierangelo comme une manifestation de ses prćjugćs sociaux plutót que de ses ref1exes racistes.
A la page suivante, «le bicot» est appele le Papas,
d’un surnom que les Musulmans donnent aux Arabes convertis. II avait ete baptise par le Cardinal Lavigerie pendant la grandę famine, puis eleve par les Peres Blancs. Son nom chrćtien ćtait Charles, celui du Cardinal son parrain [...]. II etait, en effet, tres beau. C’etait, avec quelque chose de plus robuste, la beaute andalouse dans tout son epanouissement. [...] le Papas lanęait d’une voix trainante le Tefrain de son cantique : Porte du ciel, ó vierge
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mere.
Le Papas reęoit son statut d'humain grace a sa conversion au christia-nisme, il accompagne Rafael dans ses promenades dans le quartier des Mauresques; de cette faęon il devient detenteur des secrets de Rafael, neanmoins on lui rappelle son ineffaęable empreinte de «bicot» qui ne peut pas etre effacee meme par le parrainage du grand Cardinal.
Un Arabe apparait presque toujours confronte au colon, ainsi au moment du redćmarrage des rouliers dans le Sud africain : «Un Arabe & che-val, avec un enfant en croupe, s’approcha pour demander a boire.»80 De nouveau, il est anonyme, et en position de solliciteur, donc d’un etre qui 7* Ibid., p. 52.
” Ibid. pp. 53-55. " Ibid., p. 67.