FLORENTINA CAZAN
L’un des traits caracteristiąues des mentalites populaires c’est leur •duróe dans le temps; ce fait dćtermine la perpetuite, le long des sićcles, de eertaines croyances et coutumes qui defient, on dirait, Pevolution — nieme de la socićtć. Lorsąue nous dansons la ronde au rythme ternaire, lors-•que nous touchons du bois trois fois de suitę, ou bien, nous nous frap-pons la bouche toujours trois fois de suitę avec la paume de la niain pour chasser la malchance, nous nepensons pas que nous ne faisons que rópóter des gestes qui, autrefois prenaient leur source dans une certaine spiritua-litć qui tenait a la conception de la trinitó mythique, paienne, considśree comme fonne determinantę de Pexistence humaine
Petit & petit les gestes ont ćtś dćpouillćs de leur sens originaire, en se constituant ainsi en traditions.
Mais la tradition meme a pour base des yaleuis culturelles nees des mentalitćs collectives; celles-ci sont entrćes k leur tour dans un Circuit, ont engagć un dialogue, et & la suitę, des mutations conceptuelles, de cer-taines inversions d’ordre chronologique, causal et meme thćmatique se sont transformóes en traditions que les hommes ont gardćes consciemment ou non dans 1’esprit et Parne.
La soliditć de ces actes, resultat de leur trait d’affectivitć, a dć-terminć leur existence en tant que trait d’union entre les ćpoques et les cmlisations, et c’est pourquoi leur ótude ouvre de nouvelles perspectives dans la comprćhension de Phistoire. Les anciennes coutumes sont arrivśes jusqu’& nous par Pintermćdiaire du trćsor culturel qui est le folklore; c’est pourquoi nous considśrons que (ieorges Dumś/.il remarquait & juste titre que : <« Un pays qui n’a plus de lćgendes ... est condamnś k mourir de froid ... un peuple qui n’aurait pas de rnythes serait dśjźt mort >>!.
Pour pouvoir pćnćtrer dans la spiritualitć d’une śpoque, il faut tout d’abord dćfinir et dćlimiter avec prćcision les notions avec lesquelles on opóre, et en premier lieu, le concept de culture et celui de civilisation entre le8quels il y a une śtroite corrćlation sans que, toutefois, elles s’identifient. Dans les travaux d’histoire, au chapitre culture on traite d’habitude les
1 Durant la pćriode de la formatlon des peuples l’exlstence śtait conęue comme ćtant dśterminśe par trois facteurs: la souverainetś, la force et la fćconditć; ś chacune correspondalt une divinitć et le chlffre trois est devenu le chiffre sacr6. La trinltć a 6t6 assimliće sous une autre formę par le christianisme.
* G. Dum6r.il, Hcur et Malheur du Guerr‘er, Aspects myllitgues de la fonctlon guerriire ehez les Indo-Europiens, Paris, 1969, p. 11.
REV. GTUDES SUD-EST EUROP., XVIII,4, P. 631-646, BUCAREST, 1980