129
Les conflits de frontieres en Mauritanie et dans la Corne de l'Afirique
qu’il entre en conflit avec un autre droit, non moins certain : le droit de l’Ćtat k son intćgritć territoriale. Que choisir ? L’Ćtat ou les peuples ? II est clair que ce problćme n’est pas un probleme de lćgalitć, mais un problćme de lćgitimitć, donc un probleme politique.
Cela conduit k reconnaitre que les conflits de frontieres peuvent parfois etre juridiques, mais qu’il existe ćgalement des conflits politiques, qu’il faudrait dćfinir. Or, le vice de la mćthode utilisće par les juristes est que ces demiers conflits sont dćfinis par opposition aux conflits juridiques. Seraient politiques les conflits qui ne sont pas juridiques, au sens indiquć prćcćdemment. Autre-ment dit, la dćfinition est purement nćgative, ce qui n’est pas satisfaisant. II est indispensable de dćfinir le conflit politique de faęon positive. En outre, on peut faire remarquer que les choses ne sont pas aussi simples. La distinction entre le juridique et le politique est assez artificielle dans la mesure ou ils ne forment pas un couple antithćtique, mais vivent en symbiose et s’interpćnetrent. L’affaire du Sahara Occidental illustre de faęon frappante cette observation. L’illusion a ćtć de croire que la plus haute instance judiciaire internationale, en 1’espćce la Cour internationale de justice, pourrait apporter une solution au probleme du Sahara Occidental. Force est de constater, comme le fait Mme Chemillier-Gendreau, que «le discours du droit est coupć de la rćalitć. La rćalitć juridique d*aujourd’hui, compte tenu des valeurs sur lesquelles se fonde la civilisation contemporaine, est celle du rapport des forces entćrinć a posteriori par la normę juridique ».
Nous n’irons pas jusqu’& dire que le concept de conflit juridique est totalement inopćrant. II est probablement possible d’isoler des aspects juri-diques qu’il est Ićgitime de rćgler sur la base du droit; mais ce concept est le plus souvent insuffisant pour saisir les conflits de frontieres.
L’observation est importante non seulement pour la comprćhension des causes des conflits et de leur dynamique, mais aussi pour le choix des moyens propres k les rćgler de la manićre la plus satisfaisante possible. Sur ce demier point, les mćcanismes juridiques savants mis au point par l’OUA ont assez dćmontrć leur inefficacitć pour qu’il ne soit pas nćcessaire d’y insister. Dans une vue prospective, les Africains doivent faire preuve d’imagination pour trouver des moyens en accord avec leur gćnie propre, et par consćquent mieux adaptćs k la solution des conflits.
Conflits internationaux et conflits intemes
Une autre distinction familićre aux juristes est celle des conflits intemationaux et des conflits intemes. Est inteme un conflit qui oppose une fraction de la population au gouvemement lćgal de 1’Ćtat. C’est le cas du conflit ćrythrćen. Est intemational un conflit qui oppose deux ou plusieurs fitats souverains. C’est le cas du conflit somalo-ćthiopien.