88 Walter Rodney
un chapitre de conclusion sur les « NouveUes perspectives dans 1’histoire de rAfrique » est k recommander fortement. Les anciennes et les nouvelles perspectives sont inextricablement lićes k une vision plus large du monde, et le scepticisme ąuant k la faęon de caractćriser le dćveloppement historique de l’Afrique et de ses lois est aussi considćrć dans une perspective mondiale. Ce qui est en question, c’est 1’interaction des idćologies dans le cadre de la science. L’ignorer serait adopter une position nettement partisane, renforęant implicitement l’ćcole qui prćsente 1’histoire et les Sciences sociales comme neutres ou exemptes de valeurs. D’autre part, un chapitre sur la caractćrisation de 1’histoire et les lois historiques ne doit pas nćcessairement prendre une position idćologiquement partisane. Sa principale fonction serait d’indiquer la diversitć des interprćtations existantes, dont un grand nombre repose sur la croyance qu’il existe des lois d’ćvolution propres k 1’histoire de l’Afrique. Dans la plupart des cas, cette croyance est implicite; dans d’autres, l’existence de telles lois n’est pas prise en considćration. II est essentiel de noter comment chacune de ces approches a sa courbe et continue de faęonner la reconstitution de 1’histoire et de la politique africaines contemporaines.
A titre d’illustration, on peut se rćfćrer k deux textes divergents : celui d’A. G. Hopkins, An economic history of West Africa (Londres, Longmans, 1973), et celui de Samir Amin, L'Afrique de 1’Ouest bloąuće (Paris, Minuit, 1971) — traduction : Neo-colonialism in West Africa, Londres, Penguin, 1973). Hopkins ne s’identifie pas explicitement k une idćologie; il n’indique pas non plus qu’il croit en des lois quelconques qui auraient caractćrisć le dćve-loppement de la socićtć africaine. Cependant, en ćvaluant la pćriode modeme et 1’insertion de l’Afrique dans le monde capitaliste, il admet et reconnait la formulation nćo-classique du dćveloppement par le « marchć ». L’ouvrage de Samir Amin est prćfacć par un exposć idćologique de sa position et il cherche k identifier les bases idćologiques de conceptions diffćrentes, telles que celles proposćes par Hopkins. Le volume VIII n’aura gućre de place pour exprimer une prćfćrence marquće, mais il doit au moins mettre ces contrastes en ćvidence. En effet, tous les ouvrages de l’ćpoque coloniale et postcoloniale traduisent des concepts du dćveloppement de l’Afrique qui sont Iićs aux prćoccupations contemporaines sur la destinće de 1’homme et de la socićtć en Afrique et dans le monde en gćnćral. Certaines de ces opinions apparaitront incidemment dans des sections approprićes de ce volume. De plus, on pourra identifier des diver-gences, aux fins de discussion, en se rćfćrant k certains postulats ou points controversćs bien connus des cercles spćcialisćs : sous-dćveloppement/dćpen-dance, dualisme ćconomique/modernisation, socićtćs pluralistes/« tribalisme », classes/ćlite. Le ou les auteurs de cette analyse devront, bien entendu, avoir une vision mondiale, mais il devrait au moins 6tre possible de prćsenter les points de vue historiques et scientifiques sctns les caricaturer — peut-etre sous la formę de notices bibliographiques ćlargies.