dans la metaphysique de la presence, a ete remplacee par la possibilite de la vision aprioriste et directe de la verite dans toute sa, bien evidemment decente, nudite. Si, comme l’un des critiąues le remarąue, on peut apprendre le deconstructionisme en un quart d’heure en ajoutant a la generalite des slogans le quasi-savoir des salons, la verite oculaire, on ne 1’apprend guere.
En tant que philosophe de rćcriture, professeur Derrida est avant tout grand maitre de la lecture. C’est la lecture entendue non comme le chemin vers le contenu qui, en Pologne, avant les examens ou le bac, foumi sous la formę d’une antiseche sur le mar-che des libraires, fait preuve de 1’abandonnement de la lecture, mais comme une aptitude de distinguer 1’ecriture de la philoso-phie dans la philosophie meme qui tache toujours a cacher le fait qu’elle est ecrite. S’il y a une methode de la deconstruction, c’est sans aucun doute la lecture attentive et critique dont la maitrise, par Derrida lui-meme, confirment ses brillantes et perverties mais aussi tres pertinentes reinterpretations des textes des “piliers”, de Platon jusqu’a Levinas, qui nous rappellent que toutes les Solutions definitives, philosophiques ou autres, se resolvent dans la zonę fragile et insoluble de rćcriture. La foi a leur univocite et in-contestabilite est au fond un reve de la fln de la philosophie, de la fln de chercher sans cesse les Solutions par consequent de la fln de la responsabilite.
Ces consequences philosophiques d’appeler les choses par leur nom, Jacques Derrida les voit dans son nom propre dont la lecture univoque lui donnę beaucoup d’embarras. Pendant la conference intitulee Applied Derrida {Derrida appliąuee), consacree aux appli-cations diverses du philosophe franęais portant le nom Derrida, le philosophe a constate qu’etre Derrida applique (ou appliquee — car grammaticalement Derrida est du genre feminin), assister a la conference 1’application de lui-meme, c’est la situation dans laquelle il est traite comme un mort.- “J’ai voulu savoir comment c’etait etre mort. C’est pourquoi je suis ici... Je n’ai voulu rien applique. J’ai voulu y venir si denude comme c’etait possible [il enleve sa veste]. La nudite: innocence et poraographie. Comme d’habitude Geoff [Bennington] a tout dit avant que je n’aie ouvert la bouche. J’ai voulu etre imprevisible, ce qui apres lui n’est plus possible. Venir a la conference sur SOI APPLIQUĆ cest comme si l’on etait deja mort... C’est
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