CHRONIQUE DE POLICE 631
doit-il pas avoir son centre de gravite dans les quartiers Nord de la ville ? La question des effecłifs policiers ne doit plus etre Funique argumentaire. Les recrutements massifs de ces demieres annees n’ont pas beaucoup bouleverse les priorites de 1’appareil poli-cier. II est meme paradoxal qu’a Paris la yisibilite policiere soit assuree principalement par des recrutes du contingent qui, de plus en plus, se refusent a integrer la police. L’intense efTort de modemisation du plan Joxe n’a pas encore touche les structures policieres toujours fortement centralisees, s’adaptant tres mai aux disparites geogra-phiques et sociales des villes. La carte d’implantation des polices dans les communes n’a toujours pas fait Fobjet d’une revision d’ensemble.
Adaptation au terrain, adaptation a Fevolution de la delinquance. Les profits enormes tires du commerce de la drogue contaminent petit a petit les circuits finan-ciers. Au sein de la Direction generale de la police nationale vient de naitre le sep-tieme ofFice specialise « FOflice central pour la repression de la grandę delinquance financiere ». Compose de 75 enqueteurs dont 30 a Paris, la mission de FofFice est de mettre en oeuvre avec les services concemes une politique de prevention, de consti-tuer une base de donnees et d’intervenir d’initiative, en assistance d’autres services ou a l’initiative des magistrats. Ces policiers sont habilites a recueillir et a exp!oiter les informations transmises a la structure Tracfin par les etablissements financiers en ap-plication de la łoi sur la lutte contrę le blanchiment des capitaux. Si Fon ne peut que se louer du niveau de competence technique recherche, deux questions viennent peser sur le succes de FofFice : comment se conjuguera-t-il avec FofFice de repression du trafie illicite de stupefiants (OCRTIS) ?
Ne pouvait-on se contenter de renforcer le second et succomber un peu moins a la recherche deraisonnable de FefFet d’annonce ? La seconde question n’est pas nouvelle car elle conceme le rapport avec la justice. A Paris, il n’existe pas en principe de juges d’instruction specialises. Par contrę, la specialisation Financiere existe. Que va-t-on choisir ? Ces choix ne sont pas sans incidence sur la qualite du contróle de la justice sur la police. Comme pour des choix de politique criminelle, une concertation aurait ete souhaitable entre les deux institutions. Le defaut de celle-ci entraine la justice a s’adapter en generał plutót mai que bien. Ne parlons pas du desagrement psy-chologique de juges mis devant le fait accompli.
La multiplication des manifestations racistes et antisemites entraine le pays dans un debat salutaire sur les valeurs constitutives de notre lien social. Ce debat est fonda-teur de notre systeme de politique criminelle. II a entraine une remontee considerable dans la hierarchie des delits a poursuivre de toutes les ineriminations existant dans ce domaine. L’action policiere et Faction judiciaire sont fortement poussees a mener des enąuetes rapides. Mais un debat sur Futilite de la repression de Fexpression d’opinions antisemites ou racistes s’est cree — un sondage indique que plus de 35 % des Franęais sont pour cette expression — mais surtout maints auteurs mettent en doute Futilite de la repression en s’appuyant sur les maigres resultats obtenus dans la decouverte des auteurs. Le nombre d’affaires est trop ridicule. II rappelle, dans une certaine mesure, le chiffre tres bas des violences a enfants, ou celui des femmes battues avant que des campagnes prolongees d’information ne soient menees tant dans Fopinion que dans les services de police et de gendarmerie. Ainsi que le souligne le rapport de la Commission nationale consultative des droits de Fhomme « certaines manifestations du racisme ne sont pas prises en compte dans des pans entiers de la vie sociale, economique et culturelle ».
L’organisation policiere actuelle, son degre de permeabilite au phenomene handi-cape le debat sur Futilite de la repression. La ville de New York, theatre permanent de la coexistence d’une multitude de communautes, a cree une brigade speciale d’une trentaine de policiers. En 1989, 2 800 cas ont ete traites dont 1 100 ont ete deferes devant les tribunaux. La priorite de son travail est de former un corps de regles inter-pretatives des comportements racistes ou antisemites pour les autres policiers. La meme injure peut avoir une connotation plus ou moins forte suivant les lieux ou les circonstances. Sa seconde mission est d’etre saisi par les autres services. Cette bri-
Rev. science crim. (3), juill.-scpt. 1990