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contrę Pignorance et la superstition, representer le Progres et assurer le triomphe de la Science et de la Raison.»31
La France se croit particulierement predisposće a representer ces valeurs car elle est
depositaire [...] de certaines valeurs d'humanite et de civilisation [...]. La colonisation ne peut manquer d'apparaitre comme le moyen privilegie d'accćlćrer la marche vers le progr&s des masses humaines encore enlisees dans le passć.32
La littćrature, la presse vont alimenter la conscience collective d'images ou le colonisateur est le demier bienfaiteur et liberateur des races arrierees qui demandent de l'aide de la part des civilisćs. Dans ce contexte se forge Pidee coloniale en France. II faut ici souligner que le colonisateur franęais se met en valeur par rapport a son homologue anglais car će demier incame «une mauvaise colonisation, seulement avide de profits materiels et odieusement oppressante pour les populations assujetties dont elle ne cherche qu'a exploiter les richesses.»33 Rappelons encore une fois Barres qui au moment de la penetration dans le Sahara voit partout des intrigues anglaises : «[...] L'Angleterre veut a tout prix nous fermer 1'acces au Sahara.))34 La colonisation franęaise symbolise ainsi un certain humanita-risme, une dimension morale, une conception de Phomme.
Apres la dćfaite de 1870, le nationalisme franęais comprend deux conceptions : celle de vocation continentale centree sur la recuperation de PAlsace et de la Lorraine et 1'autre orientee sur Pexpansion outre-mer. Avec le temps, cette coupure s'affaiblit; le protectorat franęais en Tunisie est etabli en 1881, et en 1912 on instaure le protectorat franęais au Maroc ou la France rivalisait avec 1'Allemagne. La victoire sur l'adversaire Continental devient un atout supplementaire pour les adeptes du nationalisme extra-europeen.
C'est contrę PAllemagne, et non plus comme dans les annćes 1880 avec son appui, presque sous son patronage que doivent maintenant triompher les ambitions franęaises. Lanti-germanisme, la preoccupation dominantę du combat contrę 1'hegemonie allemande, peuvent enfin rassembler ceux qui continuent k avoir les yeux fixćs sur la ligne bleue des Yosges.35
31 Ibid., p. 137.
32 Ibid., pp. 138-140.
33 Ibid., p. 133.
34 M. Barrćs, Scenes et doctrines du nationalisme, Ed. du Trident, 1987, p. 232.
35 R. Girardet, L'idee coloniale en France, op. cit., p. 151.