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Adeline RUCQUOI
devint au cours des deux stócles suivants l’un des principaux lieux d’acquisition des connaissances « nouvelles » ou « modemes », c’est-a-dire de la philosophie aristotćlicienne et des matóres du ąuadri-vium. L’« ćcole des traducteurs de Tolede » n’exista jamais car les traducteurs travaillerent partout dans la Pćninsule ibśriąue, notam-ment a Barcelonę et surtout en Vieille Castille, et ne constitućrent jamais une « ecole » ; Espagnols - chrćtiens et juifs Anglais, Ćcos-
sais, Italiens, Allemands, Slaves et Flamands travaillćrent pour eux-memes ou sur commande et acąuirent de nombreux ouvrages qu’ils ramenerent parfois avec eux dans leurs pays d’origine. Mais si le mouvement des traductions de 1’arabe au latin, puis au castillan et enfin au catalan, permit le transfert des connaissances, son impact rćel sur 1’education reste inconnu avant le XIIIe sićcle.
3. Ecoles et universitós (XIIe-XIIIe sibcles)
La « renaissance » culturelle du Xe sićcle dans les royaumes chrć-tiens du nord de la Pćninsule iberique fut brusquement interrompue lorsque les campagnes militaires menees par le hadjib ou vizir de Cordoue al-Mansur devasterent et desorganiserent trós profondćment, entre 980 et 1003, les royaumes de León et de Pampelune, le comtć de Barcelonę et les comtćs pyrenćens. Les blessures alors infligćes furent longues a guerir mais, k partir du milieu du XIe siacie, grace h une conjonction d’ćlements favorables - de 1’effondrement du califat de Cordoue en 1031 et de son emiettement en une multitude de petits emirats rivaux jusqu’aux changements climatiques qui favorisaient la croissance demographique de 1’Occident les chrćtiens reprirent l’avantage et entamćrent un processus de reconquete territoriale et religieuse qui dura plus de deux siecles. Cette reconquete fut legiti-mee par l’invocation du passe wisigothique et, tandis que la progres-sion geographique s’accompagnait du rćtablissement des anciens dio-ceses et archidioceses, la monarchie pretendit recouvrer le role que lui attribuaient le Liber Iudicum et les canons de YHispana Collectio. L’alliance etroite entre le pouvoir et le savoir, misę en veilleuse entre le VIIIe et le XIe siecle, se manifesta h nouveau pleinement des le XIIC.
La restauration des sićges ćpiscopaux dans les terres reconquises s’appuya sur les textes anciens et n’hesita pas k recourir, le cas echeant, k des faux pour legitimer les changements intervenus depuis la chute de la domination wisigothique; 1’abandon, entre 1090 et 1120, de rćcriture mozarabe pour la minuscule caroline contribua a cette rćelaboration. La reconstitution de la carte ecclćsiastique en Espagne s’effectua au moment oh 1’Eglise romaine, de Grógoire VII k