V Empire et sacerdoce k Byzance 127
rence de ce qui s’etait passe en Occident , la thśologie byzantine deviendra, k partir de li, nettement mystiąue. Ce phśnomćne marąuera l'śchec total des tentatives faites auparavant a Byzance en vue de forger une thśologie demonstrative 1S.
Une fois parachevśe la victoire des palamites, la dispute ideologiąue s’est poursuivie sous la fonne de l’affrontement entre thomistes et anti-tho-mistes. Les thomistes ćtaient en fait des anti-palamites, passes au catholi-cisme, qui s'opposaient i 1’idće de la lumiere «increee » avancśe par Palamas, en proclamant la naturę materielle de la lumiere qui s'ćtait rśvślee aux Apó-tres sur le Mont Thaboi, en accord avec la doctrine thomiste. Naturellement, le caractere śvident du thomisme, i Byzance de m6me qu’en Occident, rć-sidait dans le fait d’accepter l'idće de la naturę dśmonstrative de la thćologie, de mettre sur le meme plan la verite de la raison et la veritś de la foi.
Cette theorie d'une double verite— de la raison et de la foi — eut pour consequence naturelle en Occident la separation des deux domaines respectifs, fait marquant 1'śmancipation de la philosophie, exoneree de la theologie. La tentative d’introduire la raison dans le domaine de la foi, de lui accorder des valences egales k celles de la foi ćchoua k Byzance. Li, les veritćs de la foi etaient « au-dessus de la naturę humaine * (ta hyper physin), de meme que dans la doctrine des nśoplatoniciens paiens qui y avaient vecu un millć-naire auparavant. S’il est vrai que le palamisme ne niait aucunement la valeur des ćtudes profanes l6, il preconisait que leur vćrite ne pouvait pas equivaler celle de la foi. On les acceptait i la seule condition de se limiter a ce qu’on appelait «la sagesse du dehors » (sophia he exd), une sagesse infś-
rieure par rapport i la philosophie i parachevee * (he teleiotate philosophia) de la thćologie, domaine oh la raison, de l’avis des Byzantins, n’avait guire de place.
II s’ensuit que les effets de la « polyarchie » occidentale se sont faits sen-tir aussi dans le domaine spirituel17, sous la formę des tentatives de valider la vćrite de la raison dans le plan de la foi, de poser la raison au meme niveau que la foi et, implicitement, de separer, dJemanciper la philosophie par rapport i la theologie. L'śchec de ces tentatives prouva que Byzance preferait maintenir le monopole de la theologie sur les etudes profanes, la « monarchie » de la foi au depens d'une futurę « polyarchie », i 1’instauration de laquelle ćtait appelee i contribuer pleinement la faculte humaine de la raison.
Le fait que la thćologie byzantine ait maintenu jusqu’a la fin une rś-serve absolue vis-i-vis d’une certaine reflexion philosophique doit 6tre inter-
14 H.-G. Beck, Theodoros Methochites. Die Kircht des byzantinischcn Wcltbildcs im 14. Jahrhundeft# Miinchen 1952, p. 131—132. Le fait donnę un solide appui k la remarque de V. Lossky (Essai sur la thtologie mystiąue de 1'Eglise d’Orient, Paris 1944, p. 7) affirmant que toute theologie est implicitement aussi une mystique dans Tacception de rorthodoxie byzantine (v. aussi la version roumaine du mfime livre, donnie par le P^re V. Riduci sous letitre Teologia misticd a Bisericii de Rdsdrit, Bucureęti, Editura Anastasia, 1992, p. 36).
1# G. Schiró, Gregorio Polarna e la scienza profana, dans tLe Millćnaire du Mont Athos, 963—1963#, II, Venise-Chevetogne 1965, p. 81 — 96.
17 Eloquent s'av^rd le fait que dans les documents d’ćpóque (MM I, pp, 501 —502, etf 503—505, des mois d'avril et de juin 1369), le rejet de Barlaam et d\Akindynos par les ec-clósiasteś: byzantins qui avaient adhćrć auparavant k cette doctrine a lieu dans le rafeme conterte que le rejet du catholicisme et de la clause t Filioque #.