de ce qui fut inflige aux Juifs de mon pays, il y a plus d’un demi-siecle, pendant la deuxieme guerre mondiale, alors que je me trouvais encore enfant dans mon Algerie natale ou se passaient des choses analogues, quoique moins meurtrieres, en 1’absence de tout occupant allemand. Comme vous le savez sans doute, le President de la Republique franęaise, M. Chirac, avait ete le premier President a reconnaitre ofFiciellement, en tant que chef d’Etat, des son investiture, que “1’irreparable” (ce fut son mot) avait alors ete commis a 1’endroit des Juifs sous 1’Occupation. Ce qui a precede et suivi cette declaration courageuse et lucide d’un chef d’Etat meriterait de longues analyses dont nous n’avons pas ici le temps — et dont ce n’est sans doute pas le lieu. Une question reste ou-verte, passionnante et passionnee, lieu de tous les griefs: est-ce que 1’Etat franęais, dans son incontestable legalite formelle, re-presentait alors une legitimite franęaise, quant a la Republique ou quant a la nation? Cette question est aujourd’hui, en France, au coeur de debats complexes dans lesquels je ne m’engagerai pas mais dont on pourrait trouver des analogues virtuels dans le passe de bien des pays europeens. M. Chirac a fait ce qu’aucun president de la Republique, de De Gaulle a Mitterrand, n’avait fait auparavant. Notez bien qu’il n’a nomme ni 1’Etat ni la Republique, il a dit “la France”: “La France, ce jour-la, declarait-il, accomplissait l’ir-reparable.”
Vous le voyez, je vous apporte des nouvelles de mon pays, comme on 1’attend souvent d’un hóte etranger. Car voila que maintenant, plus tard que le chef de 1’Etat mais avant le Vatican, 1’Eglise de France, sur le meme sujet, se declare “en repentance”. En demandant pardon “a Dieu et aux hommes”, en demandant “au peuple juif d’entendre cette parole de repentance”, 1’Eglise de France declare s’inspirer d’une demande du Papę qui avait en effet invite les chretiens, de faęon plus generale, a “reconnaitre les flechissements d’hier” pour “renforcer notre foi”. Les episcopats allemand et polonais avaient eux-memes publie une declaration sur 1’attitude de leur Eglise pendant la guerre, a 1’occasion du 50®°^ anniversaire de la liberation d’Auschwitz. Le Papę avait aussi nomme, 1’Eglise de France le cite, “une extermination inconditionnelle [du peuple juif...] misę en oeuvre avec premeditation”. Ce bon mouvement repond sans doute a une vague de fond qui submerge les frontieres. II serait
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