9 Empire et sacerdoce k Byzance 129
etait «le pere de tous les chretiens », 1'empereur pour sa part representait ■« le pilier immuable de tous les chretiens, le defenseur des dogmes du Christ * 21,
Les disputes religieuses etaient des ąuestions qui interessaient śgale-ment l'Etat 2i. En effet, les troubles d'ordre religieux conduisaient a l'affai-blissement politiąue, tout comme les agitations seculieres conduisaient ci la ruinę de l'Etat 23. De meme que dans le cas de 1'election de l'empereur ac-complie par trois facteurs — 1'armee, le senat et le peuple (bien que le peuple ne figurę plus en tant qu'electeur dans 1'Histoire de Jean Cantacuzene) ■— , on constate des cas d'election du patriarchę par les « suffrages communs de 1'empereur, du clerge et du senat » 24, autrement dit des cas ou se retrouve la meme triplicite des corps electeurs.
Vers la fin de la guerre civile entre Andronic II et Andronic III, en 1327, le patriarchę Isaie rallia le parti du second, en demandant a Andronic II de prendre conseil aupres du haut clerge afin de resoudre la crise « au profit des Rhomees*. Comme de juste, le patriarchę considerait le differend entre 1'ancetre et son petit-fils comme une affaire d'Etat, ayant du reste couronne lui-meme le nouveau empereur. Par contrę, Andronic II repondit que personne n'avait la permission d'intervenir dans ses affaires de familie, le patriarchę etant invite donc de vaquer aux affaires de 1'Eglise, en se dis-pensant de participer aux affaires de l’Etat et de 1'Empire. Isaie exprima en retour sa surprise face ci une telle reponse, quilui semblait tous aussi etrange qu’apparaitrait la pretention du corps affirmant qu'il n'a aucun besoin de son ame 25.
Une. situation similaire allait se produire en 1341. Lors du deces d'Andro-nic III, le patriarchę Jean XIV Kalekas se prevalait de certains documents reęus du defunt empereur pour s'immiscer dans 1’administration publique sous le couvert de la minorite du successeur au tróne. Le patriarchę argumentait ses pretentions en proclamant que l'Eglise etait liee śi l'Empire de meme que Time au corps de 1'homme, leur etat et leur existence se confondant en un tout unique 26.
II s'ensuit donc qu'aux tentatives de separation -<lu Sacerdoce et de 1'Empire la tradition byzantine a repondu en proclamant formellement l'e-troite union des deux organismes: « car, ainsi que toi aussi 1'ecris, 1'Empire des Rhomees et la bienheureuse Grandę Eglise du Seigneur forment un corps unique * 27, affirmait Jean VI Cantacuzene en septembre 1347 dans un mes-sage adresse au kneze moscovite. Un document patriarcal du mois de juin 1380 developpait encore plus cette meme idee: « Les institutions les plus puis-santes dans le cadre de notre pouvoir sont 1'Empire et l'Eglise : le premier le-gifere les choses de l'exterieur, c'est-&-dire les choses reelles, perceptibles, cependant que l'autre celles de 1'interieur, situees au niveau de 1'esprit; les deux se constituent en une fortunę de prix pour les sujets, en s'offrant et en prenant, k titre reciproque, ce qu'il convenait, devenant de la sorte d'une
21 M. A. Poljakovskaja, Ob$lestvcnno-pol\ticeshaja mysi9 Yuantii, Sverdlovsk 19S\f pp, 56 et 75.
22 Nic. Gregoras, op. cit%, vol. II, p. 1038, lignes 4—6.
23 Ibidem, II, p. 823; MM II, p. 62.
24 Ibidem, I, p. 20 et suiv.; v. aussi F. Tinnefeld, dans « Jahrbuch der Osterreichischen JByzantinistik *, 36, 1986, pp. 102 et 108.
26 I. Cantacuzenus, op. cił.* I, p. 248—251.
20 Nic. Gregoras, op. cił., II, p. 579.
27 MM I, p. 263 (idće similaire, pp. 275 et 492).
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