11 Empire et sacerdoce k Hyzance 131
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document que 1’empereur « est oint du Saint Chreme et ordonne empereur et autocrate des Romains, c’est-a-dire de tous les chrćtiens, partout et tous les patriarches, les mćtropolites et les eveques mentionnent son nom, quel-qu’en soit 1’endroit et par tous ceux qui se disent chretiens, qualitć que n'a eue aucun des autres dirigeants ou chefs locaux; son pouvoir est si grand vis-a-vis de tous, que meme les Latins, qui n’ont rien de commun avec notre Eglise, mfime eux lui consentent le mśme respect et obeissance des temps revolus, quand tous nous etions unis. Donc, d’autant plus il convient que tout ęa lui- soit consenti par les chretiens fideles; quant au fait que des popula-tions (ethne) ont investi le pays de 1'empereur, il ne saurait etre convenable que les chretiens le meprisent pour cette raison, mais il s’impose plutót d’en tirer la leęon et de s’assagir a la pensee que si m£me l’empereur, le grand, le seigneur et le maitre de l’uiuvers, lui, enveloppć d'une telle puissance, s’est retrouve dans un si grand gSne, quelles seraient les epreuves guettant a sa place d’autres dirigeants locaux et chefs de moindre choses » 31.
Si 1’Empire, expression, du moins par sa titulature, de la Romę poli-tique, ćtait en train de disparaitre, le Sacerdoce, en revanche, prćparait sa survie par 1'accomplissement d’une- nouvelle unitę au nom de l’orthodoxie religieuse. La fidelitć a 1'Eglise etait insćparable de la fidćlitć au basileus by-zantin. Un ami ecrivait k D. Kydones en lui reprochant de s’$tre converti au catholicisme: «il n'est guere sans danger de se quereller avec l’empereur, le patriarchę et le peuple »32. Renier l’orthodoxisme c’ćtait se montrer dć-loyal aussi vis-a-vis de 1’Empire. Cette vćritć ćtait ćvidente des le regne d’An-dronic II. L’un de ses fils avec Irene de Montferrat, qui avait heritć de son oncle et s'etait converti au catholicisme, rentra k Byzance aprds la mort de sa mere, dans 1'espoir que la guerre civile entre le grand-pere et le petit-fils finirait par ćcarter 1’heritier dej ci designe, en dćblayant i son propre profit la voie de 1’accession au tróne. Mais la source respective notę que celui-l£ n'a-vait aucune chance, car * par son esprit, sa foi, son aspect extćrieur, par sa barbe rasee et par toutes ses habitudes, il ćtait entierement Latin»33.
Loin donc de se sćparer, 1'Empire et le Sacerdoce ont resserrć toujours
plus leurs liens. Sur le plan lćgislatif, cette situation a ete illustree par le
«Syntagma» de Matthaios Blastares, un nomokanon ćlaborć pendant la pe-
riode respective. Son ouvrage a benćficić d’une large diffusion dans le monde
post-byzantin. On peut mentionner bien des choses au sujet du róle politique
de la patriarchie ceucumenique aux XIVe — XVe siecles, mais nous nous
bornerons a la seule remarque de 1’ancien empereur Jean VI Cantacuzene.
II ecrivait: « Diriger aujourd'hui 1’Eglise n’est en rien au-dessous de la qua-
litć de maitre des affaires politiques (c’est-a-dire, precisons-nous, d’empereur),
arrivć k une grandę renommee entre tous les Rhomees, sumomme pere et zelateur de l’empereur »M.
II va sans dire que d’autres composants de la societć byzantine ont egalement profite de 1’affaiblissement du pouvoir imperial afin de montrer
n MM II, p. 190-191.
** Cf. M. A. Poljakovskaja, op. cit., p. 38.
38 Nic. Gregoras, op. cit., I, p. 396, lignes 16—17. M I. Cantacuzenus, op. cit., II, p. 438—439.