Cest une image tres peu flatteuse de la predication en Hollande, et nous voila bien loin de la maxime de Bossuet de ne precher la morale que fondee sur les mysteres de la foi.
Aussi croyons-nous que le souhait de voir ses sermons aux mains de tous les pretres n’a pas ete realise. Sinon la version hollandaise n’en serait pas toujours restee a sa premiere edition. Si Ton recourait aux predicateurs etrangers celebres, c’etait seulement pour les piller. Or Bossuet se derobait a ses larcins. II avait trop de genie, ses images et sa parole etaient trop brillantes pour la plupart des pretres hollandais, au gout plus egal, pour qu’ils pussent Timiter. En outre son oeuvre sermonnaire n’etait pas pra-tique pour 1’usage, comme Ta constate en 1890 lauteur d’un article sur son art oratoire 497). Quiconque cherchait pour son sermon un plan ou une division ne s’adressait pas a lui, mais a Massillon ou a Bourdaloue. On possedait de ces derniers des editions pourvues de bonnes analyses des sermons, alors que Deforis n’avait fait preceder ceux de Bossuet que d’une sorte de resume ne donnant aucune idee ni du plan, ni de la division, ni de la suitę logique des pensees.
La seule tracę de Temploi des sermons de M. de Meaux dans la premiere moitie du dix-neuvieme siecle, se trouve non pas dans Toeuvre d’un predi-cateur, mais dans les Melanges religieux et moraux (Godsdienstige en Zedekundige Mengelingen). Dans ces feuilles, destinees a foumir une con-tribution a Tetude de la religion et a Tamelioration des moeurs, Tauteur en avait insere plusieurs fragments 498). Vu le but de sa publication, il a eu la main heureuse, et il prouve avoir bien penetre les intentions de Bossuet.
Depuis le retablissement de la hierarchie episcopale en 1853 on a fait beaucoup d'efforts pour rehausser le niveau de la predication, surtout par les cours d’eloquence religieuse, donnes aux seminaires. Nous trouvons un echo de ces cours dans un manuel compose par deux professeurs de „Hageveld,, 4"). Ils attachent une grandę importance a ce qu’on pourrait appeler la preparation lointaine des sermons. Ils insistent pour que le futur predicateur se formę le gout en frequentant TEcriture Sainte et les Peres de TEglise, mais aussi en lisant des auteurs modernes. Bossuet qui en avait fait de meme dans Topuscule Sur le style et la lecture des ecrivains et des Peres de l’Eglise pour former un orateur, occupe maintenant lui-meme une place importante parmi les auteurs recommandes: on renvoie les jeunes etudiants a son Exposition, YHistoire des Variations, le Discours sur UHistoire Universelle, les Elevations sur les Mysteres, et la Connaissance de Dieu et de soi-meme.
On ne se restreignait pas a des recommandations. Nous avons deja vu qu’a Hageveld on se servait du Discours, et en 1824 deja van Bommel, le
497) F. J. Gribling, dans De Katholiek, t. 97 (nieuwe reeks t. 90; 1890), p. 46 sq.
498) Elles ont paru de 1824 a 1828. Nous aurons encore a reparler de Tauteur, J. G. Le Sagę ten Broek.
409) A. Cooth et M. Lans, Handleiding.
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