748 EMIL BOLDAN 12
Quatre lettres d'Arthur Baligot de Beyne
Constantinople, 3 avril 1861
Mon Prince,
J’ćprouve une joie bien sincere & vous faire part du succes de la lettre autographe que Yotre Altesse a envoyśe k Mr. 1’ambassadeur de France par 1’intermediaire de Mr. Place.
Hier, je passais la soirće au Palais de France. Mr. de Lavalette*a bien voulu ąuitter son jeu pour m’entietenir de Vos affaires.
« J’ai reęu une lettre du Prince Couza, me dit S E.; une lettre d’ex-plications, charmante, tr6s longue, tcrite de sa propre main (Je souligne ces mots parceąue Mr. de Lavalette appuya visiblement et avec une satis-faction marąuóe sur ce dćtail. Pour etre ambassadeur & ambassadeur de Francę, on n’en est pas moins honime). J’en suis tr6s content; NAgry a connaissance de cette lettre? »
Je crus devoir repondre affirmativement.
— «Je suis bien heureux, ajoutai-je, de voir la satisfaction de Y. E. Elle ne me laisse pas de doute que le Prince n’ait rśussi a dissiper les f&cheuses próventions excitśes par la dernióre phase de l’affairedes armeB >>.
— « Le Prince s’en tire aussi bien que possible. U me rapelle que je l’avais engagć & vivre en bons rapports avec sir Henry Bulwer. Cela est vrai: mais il ne fallait pas aller jusqu’& se compromettre, se donner des torts qui devaient etre graves pour nous. Cette lettre est bien faite. J’au-rais voulu rśpondre immćdiatement au Prince; mais cela m’a śtś absolu-ment impossible. Je suis accablć! J’ai chargć de Lallemand dAcrire k Place pour m’excuser aupres du Prince. Je ne laisserai pas partir le premier courrier sans rśpondre».
Le ton de Mr. de Lavalette śtait for gracieux de s’harmonisait par-faitement avec son langage. Je crois etre tout & fait dans le vrai en donnant & Yotre Altesse 1’assurance qu’Elle a reconcquis presque enti&rement le terrain perdu. « Que le Prince revienne & ses anciens, & ses vrais amis * m’a dit encore en me quittant Mr. de LavaJette.
J’ai su, le meme jour, de Mr. 1’ambassadeur de France, qu’il avait reęu par le dernier courrier une dćpeche de Mr. Thouvenel, tres favorable aux demandes de Votre Altesse, que cette dćpeche a ćtć communiquće & Mr. 1’ambassadeur d’Angleterre, et que l’accord est complet entre les cabinets de Paris & de Londres. Je dis k Mr. de Lavalette que cette action commune aurait besoin de se faire sentir promptement, car je venais d’ap-prendre que le Conseil des ministres avait inscrit la question des Princi-pautćs & son ordre du jour. Sir Henry Bulwer avait vu Aali pacha lundi; Mr. de Lavalette l’a vu k son tour, et la question a dti etre discutće cette nuit meme. Je ne renie pas que je puisse apprendre le rćsultat ce matin. Par le courrier de samedi, Yotre Altesse recevra tous les renseignments qu’il sera possible de se procurer.