Froncis Esmenard
par les tribunaux chargćs des questions de concurrence (Royaume-Uni) ou expressćment exclus des lois sur la librę concurrence (Allemagne Fćdćrale).
C’est au dćbut des annćes 1970 que commencent d’apparaitre en France, dans quelques grandes surfaces, des livres systćmatiquement discountćs. Mais cest en 1974, avec l’ouverture par la FNAC du magasin de la rue de Rennes £ Paris, que le fonctionnement du prix conseillć franęais connait une misę en cause dćcisive : voil«i que s’installait rive gauche, c’est-2>dire au cceur de la plus forte concentration geographique de grands acheteurs de livres, une trćs vaste librairie en self-service pratiquant un discount systćmatique de 20% sur tous les livres, selon une formule inaugurće avec beaucoup de succćs dans les annćes soixante pour Pćlectro-mćnager, les ćlectrophones et tćlćviseurs, les articles de sport, etc. Trćs vite, le bassin de chalandise de la FNAC-rue de Rennes s’ćtendait non seulement & toute 1’agglomćration parisienne, mais mćme & certaines villes de province, comme Orlćans, Amiens, etc. Pour un fort acheteur de livres, cest&dire le plus souvent un membre des professions intellectuelles, un discount de 20% est d’une extraor-dinaire sćduction : les libraires parisiens ont ćtć les premiers & le constater, qui uoyaient des clients de plus en plus nombreux les abandonner purement et sim-plement, soit, plus cruellement, venir choisir et consulter chez eux des !ivres, noter les rćfćrences et partir les acheter i la FNAC.
Le discount de type FNAC ne menaęait sans doute pas toutes les librairies fran-ęaises. Mais d’une part le succćs de Popćration-rue de Rennes ne pouvait qu’en-tralner la FNAC ż ćtendre le systćme, et, d’autre part, vers la fin de la dćcennie, les grandes surfaces de type classique, avant tout voućes aux produits de grandę consommation, commenęaient en plus grand nombre & ouvrir des rayons de livres discountes: & la diffćrence de la FNAC, qui stockait des dizaines de milliers de titres, ces hypermarchćs ou supermarchćs ne proposaient h 1’acheteur que quel-ques centaines d’ouvrages au mieux (littćrature de grandę diffusion, bandes dessi-nees, dictionnaires usuels, etc.) pour des discounts promotionnels pouvant attein-dre 40 %.
Des 1975, les libraires franęais et leur syndicat reprćsentatif, la Fćdćration Frań-ęaise des Syndicats de Librairies (FFSL), commencent & rćclamer, contrę la concurrence par les prix du discount, le remdde du prix net; les ćditeurs pour leur part, s’ils ne peuvent que saluer la rćussite commerciale de la FNAC et observer avec intćret l’arrivće de certains livres dans les grandes surfaces non spćcialisśes, partagent nćanmoins l’inquićtude des libraires, car ils connaissent 1’importance uitale de ce rćseau pour la grandę majoritć de la production ćditoriale. Mais pour eux, le remóde est de chercher soit du cótć d’un prix unique, comme dans la plupart des pays europćens, soit vers un systóme de double secteur, lequel pose cependant de redoutables problćmes. Le ministre des Finances va interrompre ce debat en 1979, en instituant le prix net.
L’expćrience du prix net: 1980-1981
Si 1’instauration d’un systdme de prix net rćpond, ź l’ćpoque, aux voeux de la FFSL, elle s’inscrit egalement dans la politique gćnćrale de libćration des prix des produits industriels promise par le gouvernement Barre et le ministre de l’£cono-mie M. Monory. Mais Pexpśrience va se rśvćler dćsastreuse, et la meme FFSL se declarera, dćs la fin 1980, en faveur du prix unique. Que s’śtait-il passć ?
La pierre angulaire du systćme du prix net est 1’interdiction faite au producteur, 1’editeur, de faire connaitre tout prix de rćfćrence permettant par diffćrence 1’affi-
98 Reuue Fronęaise du Marketing • n° 106 • 1986 1
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