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couvrant les annees 1960 a 1985, Manon Froger nous indiąue que l’on passa du cinema documentaire institutionnel, avec une signature institutionnelle, au developpement de ce qu’il convient d’appeler le film d’auteur. II y eut a l’epoque une autonomisation des cineastes documentaristes face a Timprimatur corporative gouvemementale de 1’institution. Animes d’un sens social aigu, les cineastes allaient, en leur nom propre, en tant que crćateur, prendre part a l’effervescence de l’epoque et faire leur la maxime de Gaston Miron : « Je suis sur la place publique avec les miens et la poósie n’a pas a rougir de moi ».

«II faut se souvenir qu’au debut des annees 1960 l’ONF ćtait reveche a [Vautonomisation] du documentariste en auteur...Le documentariste se positionnait (alors) comme auteur pour faire valoir le droit de chacun a exprimer son point de vue; il construisait son film dans une optique minoritaire, au nom de tous ceux qui ne prenaient pas la parole... c’est prćcisćment cette demarche qui heurta k plusieurs reprises la direction de FONF, qui croyait en sa mission mediatique d’organisation du debat public entre acteurs agrććs ou qui se contentait de remplir son office de propagandę gouvemementale³⁸ ».

Les cineastes, a 1’image de la societó quebecoise qui s’ouvre et se deploie sur le monde, s’ils oeuvrent toujours au sein de 1’institution, vont s’emanciper, du moins en ce qui concerae le processus crćatif et vont s’inscrire dans la societe qui les anime et a laquelle ils participent. On assiste a la creation du «Groupe de recherche social». Un des leaders du groupe sera Maurice Bulbulian, pour qui le medium communicationnel est une cle de transformation sociale : on assiste a i’avenement du film-outil « Pour Maurice Bulbulian, le probleme de la pauvrete est pourtant d’abord un probleme de democratisation de la communication. [C’est une prospection de ce cóte que je veux tenter en proposant a l’ONF de produire dcux films sur le themc de la guerre a la pauvrete]³⁹». Bublbulian, comme les Leduc, Dansereau et consorts interviennent directemcnt maintenant dans la tramę sociale. Non seulement le cineaste intendent, mais il le fait en collaboration avec les acteurs sociaux

³⁸    FROGER M, 2009, Le cindma a l'epreuve de la communaute, Montreal, Les presses de l’Universite de Montrćal, p.80-81

³⁹    FROGER M, 2009, op.cit. p.41