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M : Dy moy au surplus : ces choses terribles, que l'on diet estre en Enfer, te font ii point peur? comme est Cerberus chien a troys testes : le bruict bombie du fleuve Cocytus : ie passaige du fleuve Acheron : Tentalus estant en 1'eaue jusąues au men ton & mourant de soif : la peine perdue de Sisyphus en remontant sa roche : & les juges paravanturę inexorab!e Minos, & Rhadamantus, au tribunal desąuels ung L Crasus, ou M. Antonius ne defendra point ta cause [...] A : Pense tu, que je soys si hors du sens, & entendement, que je croye rien de tout cela? M: Comment, ne le croy tu pas? A: Rien du touL M : Voyla tresmaulvais propos. A : Pourquoy? M : Je pourroys estre ie plus eloquent du monde, et si ne ne pourroys persuader telles choses, si tu ne les croys de toy mesmes. A : Mais qui est celuy, auquel ii ne soit facile convaincre, & refuter teiz monstres de Painctres, & poetes? M : Toutesfoys les livres des philosophes sont pleins de telles asserdons, & asseurances de moastres. A : lis resveront, tant qu'Us vouldront Car qui est personne tant beste, et sans cueur, qui ayt peur de telles faincuses? M: Sil n^ a donc point de miserables aux Enfers, ils ne se trouve personne ausdicts Iieux. A: Telle est mon opinion.
M : (...) Quant au lieu ou [les ames] font leur residence [apres la mort], & touchant leur formę, il faut apprendre cela par rai son. De laquelle raison la non congnoissance nous a introduict ces fictions dTnfers, et ces monstres horribles : desquels non sans cause tu te mocquoys n'a pas long temps. Aulcuns Antiques ont tenu, que les corps tombant en terre par mort, & estant couvert de terre (dont nous disons inhumer) les morts passoyent le demeurant de leur vie soubs celle terre. Et de telles opinions se sont ensuivyes de grandes erreurs, que les poetes ont augmentees par leurs fictions. Car il est impossible, que 1'assemblee du Theatre, ou sont femmes imbecilles tfesprits, & plusieurs petits enfants, ne soit esmeue, oyant des vers si horribles, et aspres.
Je viens dTnfer, ce tant tenebreux gouffre,
Ou sont esprits toujours plonges en souffre,
Ayant passć le noyr fleuve Acheron,
Et deiaissant te faux chien Cerberon,
II ma faillu graver par aspres roches,
Pour devers vous faire en dueil mes approches.
Plus, telles erreurs, & abus (lesquelz je pense estre du tout abolys) ont es te si bien repceus par le passć, que combien, que le peuple rude sceust les corps des morts estre brusles (car telle est la coutume) toutesfoys aulcuns faignoyent tout plein de choses estre faictes en Enfer, lesquelies ne se peuvent faire. ou entendre sans corps. Quelle mocquerie! [...[ De li procedent ces belles resveries dUomerus,
Iesquelles il fainct touchant les morts.3 2
3 - Les Quesrions TuscuUmes de M. T. Oceron. (Euvre trezutile, & necessaire pour resister a toute virieuse passion d\esprir : <4 panenir au mespris, &. contannemcnt de la morry nouveHemem rraduict