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et jamais Lun se mesie du metier de l'autre »18. Comparativement aux femmes chinoises, les amerindiennes possedent une position sociale relatwement egale a celle des hommes. Au dire des missionnaires, « les femmes ont icy un grand pouvoir » et les hommes ne peuvent pas Ieur imposer Ieur volonte. Cette situation deplait aux jesuites qui essaient dłinculquer aux autochtones leurs conceptions europeennes. Ainsi, lorsąue Ie pere Le Jeune demande a un « Capitaine des AIgonquains » son fils pour Finstruire, ce demier refuse sous pretexte que sa femme ne le veut pas. Le pere replique qu’«il estoit le maistre, & qu’en France les femmes ne commandoient point a leurs maris [...] »19.
Politiquement, chaque elan se donnę un chef (parmi les Iroquiens, il y a un chef de guerre en plus du chef civil), appele generaiement « capitaine » par les jesuites. Ce chef est nomme par voie dłeIection, sauf si le fils d’un chef est dote des memes qualites que son pere20. On le choisit selon sa valeur personnelle: intelligence, eloquence, generosite et bravoure. Different du fonctionnaire regional chinois qui possede des pouvoirs civils, judiciaires ou encore militaires dans la region qui releve de sa juridiction (province, prefecture ou district), le capitaine amerindien n’a pas de pouvoir coercitif. Selon Le Jeune, « Ces capitaines ici ne gouvement pas leurs sujets par voie d’empire et de puissance absolue, ils nTont point de force en main, pour les ranger a Ieur devoir [...] »21. En effet, le chef nłimpose pas sa volonte aux membres de son elan; il Ieur sert plutót de porte-parole. Son mandat est de representer la volonte publique et ses decisions doivent etre prises par voie de consensus. En un mot, le chef amerindien exerce son pouvoir uniquement par la persuasion et non par la force. De plus, il s'adonne a la chasse et a la peche comme les autres individus de son elan et meme travaille avec sa familie souvent «plus fort que toutes les autres maisonnees »22.
18 THWAJTES. The Jesuit Relations [...]. 1959. vol. 5. 1633, p. 132 (Relation de LE JEUNE).
19 Ibid. vol. 5. 1633. p. 178-180.
20 Selon la Relation de 1639. « si le fils d’un Capitaine a quelque conduite, sur tout s’il a quelque eloąuence naturelle. il tiendra la place de son pere ans contredit», dan<; THWAJTES, The Jesuit Relations [...], 1959, vol. 16, 1939, p. 134 (Relation de LE JEUNE).
21 Relations des jesuites, 1972, vol. 1, 1636. p. 122 {Relation de LE JEUNE).
22 THWAJTES. The Jesuit Relations [...], 1959, vol. 10, 1636, p. 232 {Relation de BREBEUF) ;
TRIGGER. The Huron Farmers [...J. 1989, p. 81-82 ; Georges E. SIOUI, Les Wendats: une civilisation meconnue. Sainte-Foy. Les Presses de l’Universite Laval, 1994, p. 254.